Wednesday 31 October 2012

Thaïlande, Laos. Qu'est-ce qu'une religion ?


Le 17 octobre 2012

Sur le train de nuit qui me mène de Bangkok à Nongkai et Vientiane

Je ne suis plus passé par Vientiane depuis la fin des années 90, venant en voiture louée de Luang Prabang en compagnie de Jeff et de son épouse indonésienne. J'entends et lis des avis contradictoires à propos de Vientiane : soit la ville change très vite, soit tout y est encore lent et poussiéreux comme il y a quinze ans. Hâte de me faire une opinion.

Imprudemment j'ai réservé et payé 10 jours à la Villa Sisavad, près du Wat Sisavad, Chantanabury

Le 18 octobre 2012

J'avais oublié que venant de la fraîche Luang Prabang, même au mois d'août, j'avais été désagréablement surpris de retrouver à partir de Vang Vien une touffeur semblable à celle de Bangkok ou de Saïgon.

Nous sommes en octobre et alors que Hanoï connaît sans doute des températures paradisiaques, le thermomètre dépasse encore ici les 30° entre 10 h du matin et 16 heures. On me rappelle qu'ici comme à Bangkok, il n'y a ni automne ni hiver. Rien qu'un léger fraîchissement en décembre et janvier.

Bilan de mon passage à Bangkok.

Content d'avoir revu Thierry et Sunisa. Rassemblé des infos sur les loyer des studios au mois dans la quartier de Sathorn : autour de 12 000 baths/mois toutes charges comprises HTVA. Mais re-découvre surtout qu'il me serait difficile de vivre dans une ville où la température descend rarement en dessous de zéro, aussi pratique soit-elle.

A part cela l'événement principal de ce séjour de 15 jours fut sans doute la rencontre de Hubert Mvogo, une connaissance de Thierry, jeune financier franco-congolais, intéressé par la philosophie. Après avoir débattu par e-mail du caractère « fasciste » ou non de l'islam, nous nous sommes rencontrés deux ou trois fois à l'Alliance et avons poursuivi nos échanges de vive voix.

Ci-dessous le mail que le lui ai envoyé après le dernier de ces échanges.

A Hubert sur la nature de la religion et des religions.


Nos récentes conversations me poussent à tenter de remettre de l'ordre dans mes idées concernant la réponse à la question « Qu'est-ce que la religion ? Qu'est-ce qu'une religion ? »

Si je tente d'y répondre généalogiquement par l'histoire, la psychologie et l'anthropologie, j'y verrai d'abord l'expression dès les débuts de l'humanité – et donc du langage et de la fonction symbolique – de l'émerveillement d'être en vie, partie et miroir, en même temps, de l'univers. Qu'il soit clair cependant que ni le concept ni le mot de « univers » n'existent à cette époque dans le sens où nous l'entendons aujourd'hui. Le sentiment qui doit avoir alors prévalu est sans doute celui d'exister face à Quelque chose de vivant (animisme) qui me nourrit et auquel je retourne à la mort. Ce quelque chose correspond sans doute au Cela (ça) de l'hindouïsme des Oupanishads. C'est aussi sans doute ce « quelque chose », ce « ça » qui devint dieux dans les polythéismes divers puis Dieu dans le monothéisme.

Mais l'homme primitif, lieu originel de cet émerveillement n'est pas la monade, l'individu, tel que l'a par après conçu l'Occident. Il est d'emblée inséparable de sa famille, de son clan, de sa tribu.

D'emblée aussi cet émerveillement, cette extase, s'accompagne de la crainte, de la certitude de la mort qui met fin à l'extase. Afin de soulager cette crainte, l'homme va tenter de créer de l'espace pour ses projets, de faire reculer « le mur » existentiel de la mort qui bouche son horizon. Il va d'abord se projeter dans sa progéniture, sa famille, son clan.

La première religion sera sans doute le culte des ancêtres, religion de la famille, du clan, de la tribu, s'accompagnant du devoir moral d'engendrer. Cette première strate de la conscience religieuse est encore bien vivace dans les animismes d'Afrique et d'Asie ainsi que dans le taoïsme et le confucianisme chinois mais on en retrouve encore trace dans les religions « ethniques » ou nationales comme le judaïsme, et même dans les deux grandes religions universelles que sont le christianisme et l'islam dans la mesure où le mariage et la procréation y sont toujours encouragés mais au bénéfice cette fois de la survie et de l'expansion non plus tant d'un lignage, clan ou tribu, que de l'Eglise ou de l'Oumma musulmane.

Nous voyons donc que l'émotion religieuse individuelle est dès l'origine captée, détournée, aliénée par le groupe, lignage, clan, tribu, nation et plus tard religion transnationale organisée. De sentiment privé, l' émotion religieuse est très tôt devenue objet culturel ou sociologique.

*

Le bouddhisme sera le premier à analyser le phénomène religieux. Plutôt que religion, il est une psychologie débouchant sur une « science de la religion » et une « technique de guérison, ou 'libération' » visant d'emblée le bien-être ou la « non-souffrance » de l'individu par une forme d'auto-hypnose accompagnée, comme l'épicurisme, d'une éthique du contrôle des besoins et des désirs.

Pour recréer l'extase il va utiliser une des multiples techniques yogiques indiennes – méditation, dhyana, zen visant à se libérer de la crainte du futur et des regrets ou remords afin de vivre le moment présent - la développer tout en la séparant du contexte religieux de l'hindouïsme de son époque, le védisme. Il va nier l'existence d'une âme qu'elle soit universelle (Dieu ?) ou individuelle et va, comme un peu plus tard Epicure en Grèce - qui lui aussi faisait de la concentration dans le moment présent l'essentiel de l'ascèse matérialiste - réduire les dieux au statut de « créations de l'esprit humain à des fins de suggestion thérapeutique ».

Le Bouddha a bien compris que l'hypnose est un des ingrédients fondamentaux de toute religion, mais aussi de tout système politique autant que de tout système de « fidélisation » des clients. Mais il tente de mettre au service de l'analyse de soi et des phénomènes le très grand calme qui accompagne les premières phases de la méditation (samatha). Pour la première fois dans l'histoire, l'hypnose est détournée de l'utilisation qui a jusque-là toujours été la sienne, le contrôle des individus par le groupe, pour la mettre au service des individus eux-mêmes.

Les techniques d'induction de l'hypnose utilisées par le bouddhisme ressemblent fort à celles utilisées par les religions : concentration sur un point brillant ou coloré, sur une idée, une image, un mot, un vers poétique, le souffle respiratoire. La différence est que, dans le bouddhisme originel au moins, ces techniques, sont envisagées comme telles, ne sont pas associées à des métaphysiques ou à des récits eschatologiques ( narratives), impliquant une notion de « victoire finale » et ou de domination universelle. Le Canon pâli va jusqu'à prédire la disparition du bouddhisme, avant sa renaissance il est vrai. Et lorsque le mahayana envisage une mythique « fin de l'histoire » c'est sous la forme de l'illumination de tous les êtres vivants non sous celle de la victoire d'une organisation, d'un état ou d'un groupe d'états, fussent-ils bouddhistes.

Bien sûr les associations (sangha) bouddhistes solliciteront bientôt, que ce soit en Inde ou en Asie de l'Est ou du Sud-Est, la protection des états qui à leur tour les utiliseront pour atteindre leurs objectifs. Mais cela n'empêche que le bouddhisme reste foncièrement individualiste. Il n'y a pas de salut collectif qui soit le résultat automatique de l'adhésion à une doctrine ou à une organisation. Le salut est le fruit d'une ascèse individuelle méthodique, clairement distincte du contenu des doctrines élaborées au cours des âges par les différentes écoles du bouddhisme. Le bouddhisme est orthopraxie plutôt qu'orthodoxie.

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La seconde grande religion qui tentera de transcender la famille, le clan, la tribu et la nation, sera le christianisme. Les Eglises – même orthodoxes, même protestantes – se veulent toutes « catholiques » c'est-à-dire « universelles ».

Le christianisme recourt moins aux techniques hypnotiques que le bouddhisme. Il vise à rassurer l'individu en souffrance non par l'identification à un groupe ethnique mais un type de suggestion émotionnelle l'assurant que Dieu l'aime personnellement comme pourrait le faire un père ou une mère. Le gage en est que Dieu se serait fait homme et serait mort pour le sauver. L'individu se projette ici non plus dans la perspective de la survie de sa progéniture ou de sa race mais dans celle de sa survie personnelle et de la victoire eschatologique de l'Eglise, assemblée des « enfants de Dieu » et la réalisation sur terre de la Cité de Dieu.

Le fidéisme chrétien et le caractère irrationnel de certains de ses dogmes provoquèrent en Occident à partir de la fin du Moyen-Âge et de la Renaissance une critique de la religion qui devait aboutir à un retour aux prémisses métaphysiques de l'antiquité, à un affaiblissement du rôle des Eglises dans les sociétés occidentales modernes et à différentes formes de sécularisme ou de laïcité. Les sociétés occidentales les plus sécularisées gardent cependant du christianisme son égalitarisme (ni caste, ni race dominante) et son souci d'un minimum de justice sociale.

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Mahomet, représente au 6e siècle EC, le porte-parole de l'humiliation historiques des tribus arabophones polythéistes de l'Arabie. Initiateur de la dernière des religions universelles, il est remarquable en ce qu'il semble avoir parfaitement compris les mécanismes de l'hypnotisme et de la suggestion qu'il va mettre au service du nationalisme arabe (Le Coran est « une révélation en arabe pour les Arabes »). Plus l'objet hypnotique est simple, plus il est efficace. Les instruments de mobilisation de Mahomet sont

  1. une idée : l'unicité absolue de Dieu
  2. de cette idée un Arabe, lui-même, est le formulateur, en arabe pour les Arabes
  3. une invocation, un mantra « Allah Ouakhbar » qui est aussi cri de ralliement et cri de guerre destiné à intimider et terroriser l'adversaire (comme d'ailleurs le voile complet des femmes musulmanes).
  4. Le Coran, livre pas très long et d'une lecture assez facile si on le compare à la Bible, aux Védas hindous et au Canon bouddhique. Le Coran ne peut être interprété que par les arabophones.

Mais Mahomet à plusieurs points de vue a échoue à faire de l'islam l'instrument fédérateur qu'il voulait :

  • de la société arabe pré-islamique il garde la structure clanique endogame ; s'il tente de l'élargir aux dimensions de l'Eglise musulmane, l'Oumma, il réussit moins bien que le Judaïsme qui arriva à effectivement fédérer les Douze tribus issues de Jacob pour en faire un seul peuple, ou que l'Eglise catholique qui dès sa victoire à Rome au 4e siècle puis dans le Saint-Empire s'attaqua avec succès à l'endogamie de clan, ce qui aboutit à une société relativement intégrée malgré la survivance de la caste aristocratique. Les inconvénients de la structure clanique se manifestent jusqu'à nous jours dans les sociétés arabe, pachtoune et turque particulièrement par une hostilité endémiques entre clans et sectes pourtant musulmanes.
  • Il transpose dans les rapports inter-religions l'hostilité absolue et sans scrupule, ainsi que la mauvaise foi, qui marque les rapports entre clans ou tribus se disputant un même territoire ou une même ressource.
  • A l'époque de la globalisation et d'internet tout le monde peut lire le Coran sinon en arabe au moins dans plusieurs traductions. Un livre qui ne fut d'abord accessible qu'aux Arabes, lettrés ou non, aux musulmans lettrés turcs, pachtounes ou indiens est maintenant à la disposition de tous sur le site Lexilogos par exemple. Or ce livre comporte plusieurs dizaines de passages qui sont à notre époque extrêmement problématiques car exprimant une hostilité insultante et meurtrière à l'égard non seulement des Juifs et des chrétiens mais aussi des polythéistes, au rang desquels d'après les critères mêmes de l'islam, il faut placer un milliard d'hindous, plus d'un milliard de chinois, et sans doute encore plusieurs centaines de millions d'animistes répartis sur toute la planète que ce soit en Amérique du Sud, en Afrique ou dans les régions himalayennes d'Asie. Soit cinq ou six milliards de personnes. 

*

Il est peu probable que des sociétés qui envoient des vaisseaux spatiaux et des hommes dans l'espace se laissent intimider par l'islam et que l'avenir lui appartienne alors qu'au sein de ses oulémas existent encore des experts qui mettent en doute que l'homme ait marché sur le lune. Dans la société globale à venir, il est probable que, comme en Occident et comme en Chine, les religions seront de moins en moins considérées comme héréditaires, que les individus de plus en plus pourront choisir les conceptions métaphysiques, religieuses ou athées, qui leur conviennent, éventuellement en changer, en choisir plusieurs ou aucune.

Mais il existe un réel danger. Si à l'avenir suite à de trop grands écarts dans les niveaux d'éducation et de revenus des différentes catégories sociales, étant donné la très grande efficacité de la technique hypnotique de l'islam - croyance en un Dieu unique distinct de la nature, pratiques telles que la répétition perpétuelle du nom de Dieu, récitation de ses qualités, psalmodie envoûtante du Coran – associée à une idéologie sectaire et malveillante vis-à-vis de ce qui n'est pas elle, paranoïaque, faisant de chaque croyant le représentant de Dieu sur terre vis-à-vis de tout qui il considère comme infidèle, même s'il est musulman, les progrès de l'islam pourrait signifier non pas la « paix éternelle » qu'il prétend signifier mais un état endémique de troubles civils. Le danger serait alors que nos élites politiques soient tentées afin de sauvegarder la paix sociale et de maintenir l'ordre public de donner aux musulmans ce qu'ils exigent déjà - la charia – qui à terme contaminerait nos codes et nos coutumes et finirait par faire des non-musulmans des parias. L'aboutissement de ce processus serait une Europe qui ressemblerait au Moyen-Orient.

Bangkok, 14 octobre 2010

L'intérêt contemporain du modèle chinois, ou extrême-oriental, des "Trois Religions qui n'en font qu'Une" (cf post du 29.10.2012)   est aussi à mon sens le rôle qu'y joue la théorie confucianiste de l'Etat incarnation du Ciel (cf Hegel, l'état comme dernier avatar de l'Esprit).

Cette idée reste intéressante de nos jours, non pas dans le sens où la Chine acquerrait une position centrale dans la structure des relations internationales, réalisant ainsi sa « destinée manifeste » d'Empire du Milieux, mais dans celui où l'ONU serait investi du « mandat du ciel » qui légitimait les empereurs de Chine, fils du Ciel, aussi longtemps qu'ils s'acquittaient des devoirs de sa charge.

Dans cette conception - où s'il perd le pouvoir suite à une révolte populaire, sa défaite est elle-même le signe que le Ciel lui a retiré son mandat - le peuple est aussi contractant avec le Ciel et l'Empereur, avec le Ciel et l'Etat.

Une telle conception politico-religieuse de l'ONU, lieu de débat et de compromis, se situe évidemment à l'opposé de celle de l'islam où l'autorité découle exclusivement d'un Dieu hypothétique tel que conçu par un Arabe du 6e siècle CE, et dont le message à l'humanité – le Coran – délivré en arabe ne peut être interprété que par des oulémas parlant arabe.

Le « mandat du ciel » des confucianistes, comme le « contrat social » de Rousseau, ou l'Esprit de Hegel ont un caractère contractuel et évolutif. Le mandat du ciel peut être retiré à l'Empereur (ou au Parti communiste) si ces derniers le trahissent. Et c'est au peuple – ou dans le cadre onusien, à l'assemblée des nations – d'en décider en dernier recours. Les Chinois ont donc l'équivalent de notre « Vox populi, vox Dei ».

L'Etat a pour les Chinois un caractère sacré. Le sinologue belge Pierre Ryckmans disait d'ailleurs « la religion des Chinois, c'est la Chine ».

Une « sacralisation » de l'ONU, avec des rites, une liturgie – car tout pouvoir repose aussi sur des symboles et des apparences - ne serait-elle pas de nature à renforcer la capacité de résistance à la tentative de coup-d'état global de l'islam et de l'islamisme, utilisant aussi très habillement rites et croyances. Je me demande aussi si les Chinois ne commencent pas, dans le cadre du développement de leur « soft power », à chercher les moyens d'adapter à leur nouveau rôle global leur antiques conceptions politiques.

Jacques Huynen
Bangkok octobre 2012




*

Plutôt qu'un seul dieu

Un seul monde 

plein et fini

Un seul univers 

vide et infini







Ceci n'est pas une pipe inscrivait Magritte sous son oeuvre représentant une pipe

Le signifiant n'est pas le signifiant

Le signe n'est pas la chose

Le doigt qui pointe la lune n'est pas la lune

Dieu n'est pas l'infini innommable

Dieu n'est pas Dieu

Il n'y a pas de dieu ...

Leur Dieu est la dernière des idoles

Dont le vrai visage, meurtrier, sanguinaire, devient de plus en plus évident  ...


*


Les dix-mille choses – l'infinitude des phénomènes - ne font qu'un, ont dit des penseurs confucianistes et bouddhistes chinois

Tout effet est l'effet de plusieurs causes
Toute cause la cause de plusieurs effets









Samedi 20 octobre 2012


Je rencontre Annie K mercredi quasiment dès mon arrivée à la Villa Sisavad. Britannique excentrique et expansive, un peu masculine, la bonne cinquantaine mais se considérant encore comme « invicible », elle se présente comme « un-exploded war bombs expert ». Elle achève un PhD à l'Université de Greenwich, et  siège à la British Military Defense Academy. Nous finirons la soirée attablés à la terrasse d'un des restaurants de Tat Dam à nous restaurer d'une salade de canard arrosé de Merlot.

Sa grand-mère paternelle était thaï et son arrière-grand-père a conseillé le roi cartographe Mongkut.
Mais de ses ascendants thaï, il ne lui reste que des petits yeux légèrement bridés. Le sourire a laissé place à de grands éclats de rire, et l'effacement ou la discrétion féminine orientale à un féminisme sans complexe.

Tout cela combiné à une très large culture, pas seulement dans le domaine des bombes, en fait un personnage remarquable.

Elle est, me dit-elle, propriétaire d'une maison Av. Foch à Paris, d'une autre dans le Sud de la France et d'un bungalow dans le Sud thaï – et me dit que j'y suis le bienvenu - mais loue à la villa Sisavad une chambre à 13 $.

Hier soir, vendredi, comme Annie prépare un voyage dans le Sud et doit aller dormir tôt, je dîne seul en ville.

Le Chok Dee est un restaurant tenu par un Belge d'Arlon. Le vendredi il propose un plat belge. Aujourd'hui moules frites. Je choisis les moules au céléri et à l'estragon, arrosé de vin blanc. Déçu car il n'y a quasiment pas de légumes dans le brouet. Les céléris sont très chers au Laos s'excuse l'Arlonnais. J'aurais dû prendre les moules à la dijonnaise...

En fin de repas, conversation avec Christophe Bart, franco-suédois qui a été brièvement moine à Suan Mokh avant de se mettre en ménage avec une femme lao à Vientiane. Il me dit quue l'Asie de l'Est et du Sud-Est resteront imperméables à l'islam. Annie K pense par contre que l'islam est partout à l'offensive dans cette partie du monde également. Elle s'inquiète de voir des mosquées pousser "comme des champignons" dit-elle, au centre de la Thaïlande où pourtant il n'y avait jusqu'à présent jamais eu de minorités musulmanes. Elle attribue ce phénomène à un afflux d'immigrés indonésiens. Mais en ce domaine, je ne fais guère confiance à ses informations. D'après Wikipedia, indépendamment des minorités musulmanes anciennes, malaisiennes et chinoises (Chin-Hui) l'islam serait en progrès un peu partout dans le royaume, résultat d'une immigration récente de Rohyngyas birmans, de Cham cambodgiens ou vietnamiens, ainsi que d'Indiens et de Pakistanais. Il y aurait même une ancienne communauté chiite remontant au XVI siècle.

La Thaïlande semble aussi peu prudente par rapport à l'islam que nous l'avons été. Malgré le conflit dans les trois provinces du Sud, l'immigration en provenance de pays musulmans, les mariages et les conversions ne semblent faire l'objet d'aucune attention particulière. Il y aurait quelque 170 mosquées rien qu'à Bangkok sur plus de 3000 dans le pays, pour la plupart dans le Sud. Il n'est pas rare de voir un troupeau de  femmes complètement voilées aux abord du quartier chaud de Silom. A l'extrémité orientale  de Sukhumvit (Nana?), paraît-il,  les minarets poussent comme des champignons. Mais je n'ai pas eu le temps de le vérifier.

Il est vrai que le bouddhisme étant encore très vivace dans la plus grande partie du pays, le pays n'a pas baissé la garde sur ce terrain comme l'a fait l'Europe de l'Ouest. Attitude très différente donc de celle des Birmans. Suite aux troubles entre la minorité musulmane Rohingya et les Birmans dans l'état du Rakhin, la Birmanie vient de refuser la présence d'observateurs temporaires ou permanents de l'OCI sur son territoire (Voir Le Point du 15 octobre 2012. Pas cons les Birmans !


Dimanche 21 octobre 2012


Ce matin, passé par la petite mosquée Jamia, la plus ancienne (1972) des deux mosquées lao. Elle est située dans une ruelle parallèle au Square de la fontaine Namphoo.

Les premiers musulmans à fouler le sol lao furent sans doute des soldats maghrébins de l'armée française. Ils quittèrent les pays avec le Français. Après l'indépendance, arrivèrent des Chams du Cambodge et du Vietnam, des musulmans thaï et plus récemment sans doute des Pakistanais et des Tamouls, vivant de la restauration halal, au total entre 600 et 1000 âmes actuellement.

Venant de la rue Sethathirath, je m'engage dans dans la ruelle et ne tarde pas à apercevoir le bâtiment blanc et deux grêles minarets couronnés de bulbes verts. J'entends des voix venant de la mosquée. Lecture ? Discussion ? Dispute ? Je ne sais. Le quartier n'a pas l'air particulièrement musulman mais au fond de la ruelle, un cul de sac en fait, un jeune en short me signifie qu'on ne peut pas passer.

Rappelant l'islam on ne voit guère à Vientiane, le long de la rue Fa Gnum, que quelques faces d'allure indienne ou pakistanaise et bien sûr de rares touristes moyen-orientaux ou des Arabes d'Europe. Rien qui suggère une offensive que semble craindre Annie – aussi islamophobe que moi mais pour des raisons différentes, tenant à son féminisme militant.

Les tables branlantes sur la levée qui longeait le Mékong, où l'on servait encore de la Beer Lao au coucher du soleil sur le Mékong à la fin des années 90, tables pour lesquelles j'ai eu envie de repasser par ici, ont disparu il y a à peine un an, me dit Clément, Franco-laotien qui tient un salon de thé de la chaîne Sinouk. Les mafias chinoises et lao en ont eu raison. La levée herbeuse a été aplanie, on y a fait passer une route - sans doute destinée à devenir une voie rapide - bordée d'un parc il est vrai ... Les cafés et restaurants de la rue Fa Gnum n'y ont plus accès. Tout cela ressemble de plus en plus à la Thaïlande.

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Flash back Hai Shan sur la Chine, son avenir (Tibet, Taiwan, Japon , Mer de Chine du sud et du nord), ONU etc.

Hai Shan approuve mon plan de faire de l'ONU le détenteur du Mandat du Ciel, et de lui rendre un culte, comme on rendait un culte à l'Empereur de Chine. Mais il suggère que l'on déménage son siège sur une île du Pacifique ou de l'Atlantique. Je suggère les Açores.

Quand lui rappelant que 40 % des investissements étrangers en Chine pop proviennent de Taïwan j'évoque les perspectives d'organisation d'élections multi-partis (PC, Kuomingtan et Libéraux démocrates taïwanais) simultanées à Taïwan et sur le continent, avec candidats du PC à Taïwan et candidats des partiw taïwanais sur le continent), il sourit d'un air rêveur mais ne me contredit pas.

Même réaction quand je remarque que, si la Chine veut garder les USA à l'extérieur de sa zone d'influence, elle devrait traiter ses voisins en alliés et non en vassaux.

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Au nord du Patuxay, arc de triomphe de style lao bâti entre 1957 et 1968 en mémoire des victimes de la Guerre d'indépendance contre la France, le Gong de la Paix offert par le World Peace Committee, association indonésienne pour la paix mondiale fondée après l'attentat de Bali en 2002. Vingt-six pays, ont accepté un de ces Perdamaian Dunia. Celui de Vientiane a été inauguré en 2008. Il porte les symboles de toutes les religions, y compris la roue du dharma, la croix et l'étoile de David. Laisse un peu rêveur lorsque l'on connaît les insultes et malédictions dont sont l'objet les juifs, les chrétiens et les polythéistes dans le Coran. Alors que bien sûr l'islam, dernière des religions universelles, est complètement ignoré par les textes sacrés de ces religions qui le précèdent de plusieurs siècles.  

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