Saturday 3 November 2012

On islam in Japan


Il y aurait entre 10 000 et 100 000 musulmans au Japon dont 10 000 converties suite à leur mariage avec un musulman. http://islamicmonitor.blogspot.com/2011/05/islam-and-muslims-in-japan.html


Un e-mail a circulé dernièrement suivant lequel le Japon se montre particulièrement peu accueillant
à l'égard des touristes, investissements et même des représentations diplomatiques des pays musulmans :

D'après un commentateur musulman, ce mail est biaisé dans la mesure où le Japon se montre peu accueillant à l'égard des étrangers en général. Exact. Ce mail est partial, insuffisamment documenté et simplificateur au point d'être souvent mensonger. Il n'empêche qu'il pose maladroitement  une question intéressante. Le critique musulman de ce mail reconnaît d'ailleurs que des attentats islamistes seraient plus difficile au Japon que dans d'autres régions du monde. Pourquoi, alors que le terrorisme islamiste affecte l'Occident, le Moyen-Orient, l'Inde et l'Asie du Sud, l'Afrique et même dans une moindre mesure, l'Australie et l'Amérique du Sud, affecte-t-il moins l'Asie du Sud-Est -  à l'exception du Sud de la Thaïlande - et l'Asie de l'Est , Vietnam, Chine, Japon, Corée ?  A cela il n'apporte pas de réponse alors pourtant que l'efficacité des services de sécurité japonais n'a pu empêcher l'attaque au gaz sarin de la secte syncrétique hindou-bouddhiste Aum en 1995.

Sa critique n'infirme pas ma théorie suivant laquelle les pays d'Extrême-Orient en se montrant extrêmement sélectif en matière d'investissement, d'immigration et d'influence culturelle, même si des nations non-musulmanes souffrent également de cette prudence, sont les seuls à s'être donnés les moyens de résister à l'expansion globale de l'islam qui, profitant là où il le peut de politiques ultra-libérales et les exploitant, accompagne et suit la « main d'oeuvre » et les capitaux.


La nouvelle suivant laquelle des milieux musulmans au Japon auraient été la cible d'enquêtes de la part de la police japonaise en 2008 (http://kavkazcenter.com/eng/content/2010/11/10/12798.shtml ) peut soit faire craindre que cette immunité relative soit menacée soit qu'effectivement le Japon et les Japonais sont sur leurs gardes, au point de frôler la paranoïa ce qui serait rassurant. Car comme disait Zarathoustra « Ce n'est pas parce que vous êtes parano, qu'ils ne sont pas vraiment en train d'essayer de vous avoir ». Et lorsqu'il s'agit de musulmans, ils sont toujours en train d'essayer de vous avoir.

Sheik Yer'Mami est cependant un peu inquiet : http://sheikyermami.com/2012/09/08/islam-in-japan/









http://islamicmonitor.blogspot.com/2011/05/islam-and-muslims-in-japan.html

Wednesday 31 October 2012

Thaïlande, Laos. Qu'est-ce qu'une religion ?


Le 17 octobre 2012

Sur le train de nuit qui me mène de Bangkok à Nongkai et Vientiane

Je ne suis plus passé par Vientiane depuis la fin des années 90, venant en voiture louée de Luang Prabang en compagnie de Jeff et de son épouse indonésienne. J'entends et lis des avis contradictoires à propos de Vientiane : soit la ville change très vite, soit tout y est encore lent et poussiéreux comme il y a quinze ans. Hâte de me faire une opinion.

Imprudemment j'ai réservé et payé 10 jours à la Villa Sisavad, près du Wat Sisavad, Chantanabury

Le 18 octobre 2012

J'avais oublié que venant de la fraîche Luang Prabang, même au mois d'août, j'avais été désagréablement surpris de retrouver à partir de Vang Vien une touffeur semblable à celle de Bangkok ou de Saïgon.

Nous sommes en octobre et alors que Hanoï connaît sans doute des températures paradisiaques, le thermomètre dépasse encore ici les 30° entre 10 h du matin et 16 heures. On me rappelle qu'ici comme à Bangkok, il n'y a ni automne ni hiver. Rien qu'un léger fraîchissement en décembre et janvier.

Bilan de mon passage à Bangkok.

Content d'avoir revu Thierry et Sunisa. Rassemblé des infos sur les loyer des studios au mois dans la quartier de Sathorn : autour de 12 000 baths/mois toutes charges comprises HTVA. Mais re-découvre surtout qu'il me serait difficile de vivre dans une ville où la température descend rarement en dessous de zéro, aussi pratique soit-elle.

A part cela l'événement principal de ce séjour de 15 jours fut sans doute la rencontre de Hubert Mvogo, une connaissance de Thierry, jeune financier franco-congolais, intéressé par la philosophie. Après avoir débattu par e-mail du caractère « fasciste » ou non de l'islam, nous nous sommes rencontrés deux ou trois fois à l'Alliance et avons poursuivi nos échanges de vive voix.

Ci-dessous le mail que le lui ai envoyé après le dernier de ces échanges.

A Hubert sur la nature de la religion et des religions.


Nos récentes conversations me poussent à tenter de remettre de l'ordre dans mes idées concernant la réponse à la question « Qu'est-ce que la religion ? Qu'est-ce qu'une religion ? »

Si je tente d'y répondre généalogiquement par l'histoire, la psychologie et l'anthropologie, j'y verrai d'abord l'expression dès les débuts de l'humanité – et donc du langage et de la fonction symbolique – de l'émerveillement d'être en vie, partie et miroir, en même temps, de l'univers. Qu'il soit clair cependant que ni le concept ni le mot de « univers » n'existent à cette époque dans le sens où nous l'entendons aujourd'hui. Le sentiment qui doit avoir alors prévalu est sans doute celui d'exister face à Quelque chose de vivant (animisme) qui me nourrit et auquel je retourne à la mort. Ce quelque chose correspond sans doute au Cela (ça) de l'hindouïsme des Oupanishads. C'est aussi sans doute ce « quelque chose », ce « ça » qui devint dieux dans les polythéismes divers puis Dieu dans le monothéisme.

Mais l'homme primitif, lieu originel de cet émerveillement n'est pas la monade, l'individu, tel que l'a par après conçu l'Occident. Il est d'emblée inséparable de sa famille, de son clan, de sa tribu.

D'emblée aussi cet émerveillement, cette extase, s'accompagne de la crainte, de la certitude de la mort qui met fin à l'extase. Afin de soulager cette crainte, l'homme va tenter de créer de l'espace pour ses projets, de faire reculer « le mur » existentiel de la mort qui bouche son horizon. Il va d'abord se projeter dans sa progéniture, sa famille, son clan.

La première religion sera sans doute le culte des ancêtres, religion de la famille, du clan, de la tribu, s'accompagnant du devoir moral d'engendrer. Cette première strate de la conscience religieuse est encore bien vivace dans les animismes d'Afrique et d'Asie ainsi que dans le taoïsme et le confucianisme chinois mais on en retrouve encore trace dans les religions « ethniques » ou nationales comme le judaïsme, et même dans les deux grandes religions universelles que sont le christianisme et l'islam dans la mesure où le mariage et la procréation y sont toujours encouragés mais au bénéfice cette fois de la survie et de l'expansion non plus tant d'un lignage, clan ou tribu, que de l'Eglise ou de l'Oumma musulmane.

Nous voyons donc que l'émotion religieuse individuelle est dès l'origine captée, détournée, aliénée par le groupe, lignage, clan, tribu, nation et plus tard religion transnationale organisée. De sentiment privé, l' émotion religieuse est très tôt devenue objet culturel ou sociologique.

*

Le bouddhisme sera le premier à analyser le phénomène religieux. Plutôt que religion, il est une psychologie débouchant sur une « science de la religion » et une « technique de guérison, ou 'libération' » visant d'emblée le bien-être ou la « non-souffrance » de l'individu par une forme d'auto-hypnose accompagnée, comme l'épicurisme, d'une éthique du contrôle des besoins et des désirs.

Pour recréer l'extase il va utiliser une des multiples techniques yogiques indiennes – méditation, dhyana, zen visant à se libérer de la crainte du futur et des regrets ou remords afin de vivre le moment présent - la développer tout en la séparant du contexte religieux de l'hindouïsme de son époque, le védisme. Il va nier l'existence d'une âme qu'elle soit universelle (Dieu ?) ou individuelle et va, comme un peu plus tard Epicure en Grèce - qui lui aussi faisait de la concentration dans le moment présent l'essentiel de l'ascèse matérialiste - réduire les dieux au statut de « créations de l'esprit humain à des fins de suggestion thérapeutique ».

Le Bouddha a bien compris que l'hypnose est un des ingrédients fondamentaux de toute religion, mais aussi de tout système politique autant que de tout système de « fidélisation » des clients. Mais il tente de mettre au service de l'analyse de soi et des phénomènes le très grand calme qui accompagne les premières phases de la méditation (samatha). Pour la première fois dans l'histoire, l'hypnose est détournée de l'utilisation qui a jusque-là toujours été la sienne, le contrôle des individus par le groupe, pour la mettre au service des individus eux-mêmes.

Les techniques d'induction de l'hypnose utilisées par le bouddhisme ressemblent fort à celles utilisées par les religions : concentration sur un point brillant ou coloré, sur une idée, une image, un mot, un vers poétique, le souffle respiratoire. La différence est que, dans le bouddhisme originel au moins, ces techniques, sont envisagées comme telles, ne sont pas associées à des métaphysiques ou à des récits eschatologiques ( narratives), impliquant une notion de « victoire finale » et ou de domination universelle. Le Canon pâli va jusqu'à prédire la disparition du bouddhisme, avant sa renaissance il est vrai. Et lorsque le mahayana envisage une mythique « fin de l'histoire » c'est sous la forme de l'illumination de tous les êtres vivants non sous celle de la victoire d'une organisation, d'un état ou d'un groupe d'états, fussent-ils bouddhistes.

Bien sûr les associations (sangha) bouddhistes solliciteront bientôt, que ce soit en Inde ou en Asie de l'Est ou du Sud-Est, la protection des états qui à leur tour les utiliseront pour atteindre leurs objectifs. Mais cela n'empêche que le bouddhisme reste foncièrement individualiste. Il n'y a pas de salut collectif qui soit le résultat automatique de l'adhésion à une doctrine ou à une organisation. Le salut est le fruit d'une ascèse individuelle méthodique, clairement distincte du contenu des doctrines élaborées au cours des âges par les différentes écoles du bouddhisme. Le bouddhisme est orthopraxie plutôt qu'orthodoxie.

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La seconde grande religion qui tentera de transcender la famille, le clan, la tribu et la nation, sera le christianisme. Les Eglises – même orthodoxes, même protestantes – se veulent toutes « catholiques » c'est-à-dire « universelles ».

Le christianisme recourt moins aux techniques hypnotiques que le bouddhisme. Il vise à rassurer l'individu en souffrance non par l'identification à un groupe ethnique mais un type de suggestion émotionnelle l'assurant que Dieu l'aime personnellement comme pourrait le faire un père ou une mère. Le gage en est que Dieu se serait fait homme et serait mort pour le sauver. L'individu se projette ici non plus dans la perspective de la survie de sa progéniture ou de sa race mais dans celle de sa survie personnelle et de la victoire eschatologique de l'Eglise, assemblée des « enfants de Dieu » et la réalisation sur terre de la Cité de Dieu.

Le fidéisme chrétien et le caractère irrationnel de certains de ses dogmes provoquèrent en Occident à partir de la fin du Moyen-Âge et de la Renaissance une critique de la religion qui devait aboutir à un retour aux prémisses métaphysiques de l'antiquité, à un affaiblissement du rôle des Eglises dans les sociétés occidentales modernes et à différentes formes de sécularisme ou de laïcité. Les sociétés occidentales les plus sécularisées gardent cependant du christianisme son égalitarisme (ni caste, ni race dominante) et son souci d'un minimum de justice sociale.

*

Mahomet, représente au 6e siècle EC, le porte-parole de l'humiliation historiques des tribus arabophones polythéistes de l'Arabie. Initiateur de la dernière des religions universelles, il est remarquable en ce qu'il semble avoir parfaitement compris les mécanismes de l'hypnotisme et de la suggestion qu'il va mettre au service du nationalisme arabe (Le Coran est « une révélation en arabe pour les Arabes »). Plus l'objet hypnotique est simple, plus il est efficace. Les instruments de mobilisation de Mahomet sont

  1. une idée : l'unicité absolue de Dieu
  2. de cette idée un Arabe, lui-même, est le formulateur, en arabe pour les Arabes
  3. une invocation, un mantra « Allah Ouakhbar » qui est aussi cri de ralliement et cri de guerre destiné à intimider et terroriser l'adversaire (comme d'ailleurs le voile complet des femmes musulmanes).
  4. Le Coran, livre pas très long et d'une lecture assez facile si on le compare à la Bible, aux Védas hindous et au Canon bouddhique. Le Coran ne peut être interprété que par les arabophones.

Mais Mahomet à plusieurs points de vue a échoue à faire de l'islam l'instrument fédérateur qu'il voulait :

  • de la société arabe pré-islamique il garde la structure clanique endogame ; s'il tente de l'élargir aux dimensions de l'Eglise musulmane, l'Oumma, il réussit moins bien que le Judaïsme qui arriva à effectivement fédérer les Douze tribus issues de Jacob pour en faire un seul peuple, ou que l'Eglise catholique qui dès sa victoire à Rome au 4e siècle puis dans le Saint-Empire s'attaqua avec succès à l'endogamie de clan, ce qui aboutit à une société relativement intégrée malgré la survivance de la caste aristocratique. Les inconvénients de la structure clanique se manifestent jusqu'à nous jours dans les sociétés arabe, pachtoune et turque particulièrement par une hostilité endémiques entre clans et sectes pourtant musulmanes.
  • Il transpose dans les rapports inter-religions l'hostilité absolue et sans scrupule, ainsi que la mauvaise foi, qui marque les rapports entre clans ou tribus se disputant un même territoire ou une même ressource.
  • A l'époque de la globalisation et d'internet tout le monde peut lire le Coran sinon en arabe au moins dans plusieurs traductions. Un livre qui ne fut d'abord accessible qu'aux Arabes, lettrés ou non, aux musulmans lettrés turcs, pachtounes ou indiens est maintenant à la disposition de tous sur le site Lexilogos par exemple. Or ce livre comporte plusieurs dizaines de passages qui sont à notre époque extrêmement problématiques car exprimant une hostilité insultante et meurtrière à l'égard non seulement des Juifs et des chrétiens mais aussi des polythéistes, au rang desquels d'après les critères mêmes de l'islam, il faut placer un milliard d'hindous, plus d'un milliard de chinois, et sans doute encore plusieurs centaines de millions d'animistes répartis sur toute la planète que ce soit en Amérique du Sud, en Afrique ou dans les régions himalayennes d'Asie. Soit cinq ou six milliards de personnes. 

*

Il est peu probable que des sociétés qui envoient des vaisseaux spatiaux et des hommes dans l'espace se laissent intimider par l'islam et que l'avenir lui appartienne alors qu'au sein de ses oulémas existent encore des experts qui mettent en doute que l'homme ait marché sur le lune. Dans la société globale à venir, il est probable que, comme en Occident et comme en Chine, les religions seront de moins en moins considérées comme héréditaires, que les individus de plus en plus pourront choisir les conceptions métaphysiques, religieuses ou athées, qui leur conviennent, éventuellement en changer, en choisir plusieurs ou aucune.

Mais il existe un réel danger. Si à l'avenir suite à de trop grands écarts dans les niveaux d'éducation et de revenus des différentes catégories sociales, étant donné la très grande efficacité de la technique hypnotique de l'islam - croyance en un Dieu unique distinct de la nature, pratiques telles que la répétition perpétuelle du nom de Dieu, récitation de ses qualités, psalmodie envoûtante du Coran – associée à une idéologie sectaire et malveillante vis-à-vis de ce qui n'est pas elle, paranoïaque, faisant de chaque croyant le représentant de Dieu sur terre vis-à-vis de tout qui il considère comme infidèle, même s'il est musulman, les progrès de l'islam pourrait signifier non pas la « paix éternelle » qu'il prétend signifier mais un état endémique de troubles civils. Le danger serait alors que nos élites politiques soient tentées afin de sauvegarder la paix sociale et de maintenir l'ordre public de donner aux musulmans ce qu'ils exigent déjà - la charia – qui à terme contaminerait nos codes et nos coutumes et finirait par faire des non-musulmans des parias. L'aboutissement de ce processus serait une Europe qui ressemblerait au Moyen-Orient.

Bangkok, 14 octobre 2010

L'intérêt contemporain du modèle chinois, ou extrême-oriental, des "Trois Religions qui n'en font qu'Une" (cf post du 29.10.2012)   est aussi à mon sens le rôle qu'y joue la théorie confucianiste de l'Etat incarnation du Ciel (cf Hegel, l'état comme dernier avatar de l'Esprit).

Cette idée reste intéressante de nos jours, non pas dans le sens où la Chine acquerrait une position centrale dans la structure des relations internationales, réalisant ainsi sa « destinée manifeste » d'Empire du Milieux, mais dans celui où l'ONU serait investi du « mandat du ciel » qui légitimait les empereurs de Chine, fils du Ciel, aussi longtemps qu'ils s'acquittaient des devoirs de sa charge.

Dans cette conception - où s'il perd le pouvoir suite à une révolte populaire, sa défaite est elle-même le signe que le Ciel lui a retiré son mandat - le peuple est aussi contractant avec le Ciel et l'Empereur, avec le Ciel et l'Etat.

Une telle conception politico-religieuse de l'ONU, lieu de débat et de compromis, se situe évidemment à l'opposé de celle de l'islam où l'autorité découle exclusivement d'un Dieu hypothétique tel que conçu par un Arabe du 6e siècle CE, et dont le message à l'humanité – le Coran – délivré en arabe ne peut être interprété que par des oulémas parlant arabe.

Le « mandat du ciel » des confucianistes, comme le « contrat social » de Rousseau, ou l'Esprit de Hegel ont un caractère contractuel et évolutif. Le mandat du ciel peut être retiré à l'Empereur (ou au Parti communiste) si ces derniers le trahissent. Et c'est au peuple – ou dans le cadre onusien, à l'assemblée des nations – d'en décider en dernier recours. Les Chinois ont donc l'équivalent de notre « Vox populi, vox Dei ».

L'Etat a pour les Chinois un caractère sacré. Le sinologue belge Pierre Ryckmans disait d'ailleurs « la religion des Chinois, c'est la Chine ».

Une « sacralisation » de l'ONU, avec des rites, une liturgie – car tout pouvoir repose aussi sur des symboles et des apparences - ne serait-elle pas de nature à renforcer la capacité de résistance à la tentative de coup-d'état global de l'islam et de l'islamisme, utilisant aussi très habillement rites et croyances. Je me demande aussi si les Chinois ne commencent pas, dans le cadre du développement de leur « soft power », à chercher les moyens d'adapter à leur nouveau rôle global leur antiques conceptions politiques.

Jacques Huynen
Bangkok octobre 2012




*

Plutôt qu'un seul dieu

Un seul monde 

plein et fini

Un seul univers 

vide et infini







Ceci n'est pas une pipe inscrivait Magritte sous son oeuvre représentant une pipe

Le signifiant n'est pas le signifiant

Le signe n'est pas la chose

Le doigt qui pointe la lune n'est pas la lune

Dieu n'est pas l'infini innommable

Dieu n'est pas Dieu

Il n'y a pas de dieu ...

Leur Dieu est la dernière des idoles

Dont le vrai visage, meurtrier, sanguinaire, devient de plus en plus évident  ...


*


Les dix-mille choses – l'infinitude des phénomènes - ne font qu'un, ont dit des penseurs confucianistes et bouddhistes chinois

Tout effet est l'effet de plusieurs causes
Toute cause la cause de plusieurs effets









Samedi 20 octobre 2012


Je rencontre Annie K mercredi quasiment dès mon arrivée à la Villa Sisavad. Britannique excentrique et expansive, un peu masculine, la bonne cinquantaine mais se considérant encore comme « invicible », elle se présente comme « un-exploded war bombs expert ». Elle achève un PhD à l'Université de Greenwich, et  siège à la British Military Defense Academy. Nous finirons la soirée attablés à la terrasse d'un des restaurants de Tat Dam à nous restaurer d'une salade de canard arrosé de Merlot.

Sa grand-mère paternelle était thaï et son arrière-grand-père a conseillé le roi cartographe Mongkut.
Mais de ses ascendants thaï, il ne lui reste que des petits yeux légèrement bridés. Le sourire a laissé place à de grands éclats de rire, et l'effacement ou la discrétion féminine orientale à un féminisme sans complexe.

Tout cela combiné à une très large culture, pas seulement dans le domaine des bombes, en fait un personnage remarquable.

Elle est, me dit-elle, propriétaire d'une maison Av. Foch à Paris, d'une autre dans le Sud de la France et d'un bungalow dans le Sud thaï – et me dit que j'y suis le bienvenu - mais loue à la villa Sisavad une chambre à 13 $.

Hier soir, vendredi, comme Annie prépare un voyage dans le Sud et doit aller dormir tôt, je dîne seul en ville.

Le Chok Dee est un restaurant tenu par un Belge d'Arlon. Le vendredi il propose un plat belge. Aujourd'hui moules frites. Je choisis les moules au céléri et à l'estragon, arrosé de vin blanc. Déçu car il n'y a quasiment pas de légumes dans le brouet. Les céléris sont très chers au Laos s'excuse l'Arlonnais. J'aurais dû prendre les moules à la dijonnaise...

En fin de repas, conversation avec Christophe Bart, franco-suédois qui a été brièvement moine à Suan Mokh avant de se mettre en ménage avec une femme lao à Vientiane. Il me dit quue l'Asie de l'Est et du Sud-Est resteront imperméables à l'islam. Annie K pense par contre que l'islam est partout à l'offensive dans cette partie du monde également. Elle s'inquiète de voir des mosquées pousser "comme des champignons" dit-elle, au centre de la Thaïlande où pourtant il n'y avait jusqu'à présent jamais eu de minorités musulmanes. Elle attribue ce phénomène à un afflux d'immigrés indonésiens. Mais en ce domaine, je ne fais guère confiance à ses informations. D'après Wikipedia, indépendamment des minorités musulmanes anciennes, malaisiennes et chinoises (Chin-Hui) l'islam serait en progrès un peu partout dans le royaume, résultat d'une immigration récente de Rohyngyas birmans, de Cham cambodgiens ou vietnamiens, ainsi que d'Indiens et de Pakistanais. Il y aurait même une ancienne communauté chiite remontant au XVI siècle.

La Thaïlande semble aussi peu prudente par rapport à l'islam que nous l'avons été. Malgré le conflit dans les trois provinces du Sud, l'immigration en provenance de pays musulmans, les mariages et les conversions ne semblent faire l'objet d'aucune attention particulière. Il y aurait quelque 170 mosquées rien qu'à Bangkok sur plus de 3000 dans le pays, pour la plupart dans le Sud. Il n'est pas rare de voir un troupeau de  femmes complètement voilées aux abord du quartier chaud de Silom. A l'extrémité orientale  de Sukhumvit (Nana?), paraît-il,  les minarets poussent comme des champignons. Mais je n'ai pas eu le temps de le vérifier.

Il est vrai que le bouddhisme étant encore très vivace dans la plus grande partie du pays, le pays n'a pas baissé la garde sur ce terrain comme l'a fait l'Europe de l'Ouest. Attitude très différente donc de celle des Birmans. Suite aux troubles entre la minorité musulmane Rohingya et les Birmans dans l'état du Rakhin, la Birmanie vient de refuser la présence d'observateurs temporaires ou permanents de l'OCI sur son territoire (Voir Le Point du 15 octobre 2012. Pas cons les Birmans !


Dimanche 21 octobre 2012


Ce matin, passé par la petite mosquée Jamia, la plus ancienne (1972) des deux mosquées lao. Elle est située dans une ruelle parallèle au Square de la fontaine Namphoo.

Les premiers musulmans à fouler le sol lao furent sans doute des soldats maghrébins de l'armée française. Ils quittèrent les pays avec le Français. Après l'indépendance, arrivèrent des Chams du Cambodge et du Vietnam, des musulmans thaï et plus récemment sans doute des Pakistanais et des Tamouls, vivant de la restauration halal, au total entre 600 et 1000 âmes actuellement.

Venant de la rue Sethathirath, je m'engage dans dans la ruelle et ne tarde pas à apercevoir le bâtiment blanc et deux grêles minarets couronnés de bulbes verts. J'entends des voix venant de la mosquée. Lecture ? Discussion ? Dispute ? Je ne sais. Le quartier n'a pas l'air particulièrement musulman mais au fond de la ruelle, un cul de sac en fait, un jeune en short me signifie qu'on ne peut pas passer.

Rappelant l'islam on ne voit guère à Vientiane, le long de la rue Fa Gnum, que quelques faces d'allure indienne ou pakistanaise et bien sûr de rares touristes moyen-orientaux ou des Arabes d'Europe. Rien qui suggère une offensive que semble craindre Annie – aussi islamophobe que moi mais pour des raisons différentes, tenant à son féminisme militant.

Les tables branlantes sur la levée qui longeait le Mékong, où l'on servait encore de la Beer Lao au coucher du soleil sur le Mékong à la fin des années 90, tables pour lesquelles j'ai eu envie de repasser par ici, ont disparu il y a à peine un an, me dit Clément, Franco-laotien qui tient un salon de thé de la chaîne Sinouk. Les mafias chinoises et lao en ont eu raison. La levée herbeuse a été aplanie, on y a fait passer une route - sans doute destinée à devenir une voie rapide - bordée d'un parc il est vrai ... Les cafés et restaurants de la rue Fa Gnum n'y ont plus accès. Tout cela ressemble de plus en plus à la Thaïlande.

*

Flash back Hai Shan sur la Chine, son avenir (Tibet, Taiwan, Japon , Mer de Chine du sud et du nord), ONU etc.

Hai Shan approuve mon plan de faire de l'ONU le détenteur du Mandat du Ciel, et de lui rendre un culte, comme on rendait un culte à l'Empereur de Chine. Mais il suggère que l'on déménage son siège sur une île du Pacifique ou de l'Atlantique. Je suggère les Açores.

Quand lui rappelant que 40 % des investissements étrangers en Chine pop proviennent de Taïwan j'évoque les perspectives d'organisation d'élections multi-partis (PC, Kuomingtan et Libéraux démocrates taïwanais) simultanées à Taïwan et sur le continent, avec candidats du PC à Taïwan et candidats des partiw taïwanais sur le continent), il sourit d'un air rêveur mais ne me contredit pas.

Même réaction quand je remarque que, si la Chine veut garder les USA à l'extérieur de sa zone d'influence, elle devrait traiter ses voisins en alliés et non en vassaux.

*

Au nord du Patuxay, arc de triomphe de style lao bâti entre 1957 et 1968 en mémoire des victimes de la Guerre d'indépendance contre la France, le Gong de la Paix offert par le World Peace Committee, association indonésienne pour la paix mondiale fondée après l'attentat de Bali en 2002. Vingt-six pays, ont accepté un de ces Perdamaian Dunia. Celui de Vientiane a été inauguré en 2008. Il porte les symboles de toutes les religions, y compris la roue du dharma, la croix et l'étoile de David. Laisse un peu rêveur lorsque l'on connaît les insultes et malédictions dont sont l'objet les juifs, les chrétiens et les polythéistes dans le Coran. Alors que bien sûr l'islam, dernière des religions universelles, est complètement ignoré par les textes sacrés de ces religions qui le précèdent de plusieurs siècles.  

Pékin, Luoyang, Xi'an. La Chine, défenseur de la foi ?


Le 21 septembre 2012

Pour ceux qu'intéressent les inquiétudes de l'Inde relativement aux probables régime de faveur consentis par le Népal aux investissements chinois :


Compléments et bémols au mail des 19 et 20 septembre.

Pour donner un peu de contexte à l'optimisme du réceptionniste de l'Alley Garden Hotel – appelons-le Xavier - reflétant sans doute celui de beaucoup de Chinois, je voudrais donner les précisions et faits suivant :

Les Hui sont présents en Chine depuis un millier d'année et sont majoritaires au Ningxia qui bénéficie comme la Mongolie et le Tibet du statut de région autonome. Ce sont les descendants de commerçants arabes ayant épousé des femmes han. Ils ont souvent un peu de poil au menton. S'il est vrai que dans l'Est, où ils représentent de très petites minorités, on les remarque peu, je sais qu'au Ningxia et dans d'autres régions de l'Ouest (Gansu, Qinghai) des tensions entre Hui et Han se manifestent assez régulièrement.

Kaïfeng représente dans l'Est un cas assez particulier. On y vit s'installer au cours du premier millénaire des commerçants juifs dont une partie des descendants se convertit à l'islam. Ces musulmans-là ne sont ni Hui ni Ouïghours – musulmans turcs du Xinjiang ou Turkestan chinois. Je suis allé dans ce qui est supposé être le quartier de ces juifs et musulmans mais n'y ai vu ni turban, ni calotte, ni femmes voilée, ni jihab ni niqab, rien qui évoque le judaïsme ou l'islam si ce n'est deux boucheries arborant une bannière noire portant en dessous de caractères chinois des caractères arabes. Une boucherie halal/kosher sans doute. Et un ou deux regards noirs à mon passage, alors qu'en général les Chinois sont plutôt souriants et même marrants.

Pour rappel la Chine est beaucoup moins tolérante avec les Ouïghours du Turkestan qu'avec les Hui, qui sont chinois et sinophones depuis plus d'un millier d'années. Les Ouïghours en effet réclament, comme les Tibétains, un état autonome. La méfiance de la Chine envers les Ouïghours n'est donc pas fondée sur des motifs religieux mais bien politiques. Elle est de même nature que celle qu'elle manifeste envers les Tibétains ou même Taïwan. C'est l'intégrité du territoire national qui est ici en jeu, non la crainte d'infiltration d'une « troisième colonne ».

Mais, bien que je ne l'espère pas, si les Chinois permettent au wahabisme de mener la même politique de subventionnement à leurs minorités que la majorité des états occidentaux leur a consenti au bénéfice des immigrés je crois que l'optimisme de la Chine ne fera pas long feu. Il est dans la nature de l'islam de tenter de s'imposer aux sociétés sédentaires, ou à défaut de s'y infiltrer avant de les réduire à la conversion ou à l'esclavage (dhimmi).

Le danger serait que la Chine, aveuglée comme nous l'avons été par notre arrogance, typique des vieilles et puissantes civilisation, ne voie pas venir le danger et ne se protège pas des stratégies habituelles aux sociétés segmentaires, parmi lesquelles l'hypergamie (qui permet aux hommes d'épouser une femme d'autres clans, tribus, castes ou religions mais refuse ce droits à leurs femmes, à qui il est ainsi interdit de sortir de leur caste d'origine) et la grande prolificité, aboutissant à une démographie incontrôlée, se fondant entre autre sur un statut défavorable de la femme.

Un moyen de contenir l'islam chinois serait de commencer par ne pas leur permettre, pas plus qu'aux Han, d'avoir plus d'un enfant et si cela ne suffisait pas, d'interdire aux musulmans d'épouser des femmes qui ne sont pas nées musulmanes.

Revenant d'avoir visité les Temples du Ciel, du Soleil, de la Lune et de la Terre, où le culte n'est plus célébré depuis la victoire du communisme, j'avais dit à Xavier trouver regrettable que ces rituels aient disparu. Comme je lui disais qu'il faudrait que le Président de la République recommence à sacrifier aux astres chaque année comme le faisait jadis l'Empereur, il me regarde un peu narquois et précise : pas « sacrifier », mais faire une cérémonie, réciter des poèmes et offrir de l'encens.

« La religion est l'opium du peuple » disait Marx. Mais sans cet opium, il semble que les peuples ne puissent ni vivre ni survivre et conserver leur identité. Sans un opium de cette sorte, l'espèce humaine en imaginant qu'elle soit un jour intégrée, dans le cadre de l'ONU devenu Etat universel, dans le meilleur des cas, pourrait-elle survivre ? En attendant, les civilisations qui se détournent de leurs religions traditionnelles sans fournir de « produit de substitution » le font au risque de se voir infiltrées puis détruites par des idéologies religieuses d'autant plus hypnotiques qu'elles sont simplificatrices comme l'est l'islam. C'est en fait la découverte majeure de Mahomet : plus c'est simple et brutal, mieux ça marche.

Le bouddhisme, qui n'est pas une religion à proprement parler – les entités suprêmes n'y sont pas des dieux mais des entités abstraites ou des états d'esprit, le Nirvâna, le Vide - utilise cependant certains des outils des religions – l'efficacité des symboles mais aussi l'hypnose - est un des premiers à l'avoir compris. Il représente en quelque sorte la méthadone de ces drogues dures que sont les religions monothéistes.

Si on considère qu'il y a en Chine quelque 300 millions de bouddhistes, un quart de sa population, cela en fait le premier pays bouddhiste du monde. Elle commence d'ailleurs à chercher, encore maladroitement, à utiliser cette donnée dans la cadre de sa recherche de voies d'affirmation d'un « soft power » - pouvoir d'influence, culturel et idéologique. Dans ce domaine, en dehors de son art millénaire, de sa langue et de sa littérature – difficile d'accès pour les non-chinois – la Chine a peu à exporter. Ni le taoïsme, ni le confucianisme, ni le communisme chinois ne peuvent être envisagés comme des produits d'exportation idéologiques. Ces idéologies sont trop spécifiquement chinoises et aussi peu susceptibles de s'acclimater en dehors de Chine que ne l'est l'hindouïsme, et ses castes, en dehors de l'Inde. Le bouddhisme par contre a derrière lui une longue histoire d'adaptation dans des environnements complètement différents de celui de ses origines.

La mode du zen japonais en Occident a peut-être joué un rôle non-négligeable dans la promotion des produits de ce pays en Occident depuis la fin de la Deuxième guerre. Pourquoi la Chine ne pourrait-elle pas exporter ses nombreuses écoles de bouddhisme ? Et se posant en tant que Dharmapala (défenseur de la foi)  protéger comme il conviendrait les lieux saints bouddhistes en Inde et au Népal. 

*

Je passe, pour ne pas lasser le lecteur, à des sujets plus légers.

Pékin. Au premier abord, venant de l'aéroport, même par grand beau temps comme le jour de mon arrivée, la ville semble un peu grise : océan de HLMs de béton. Mais propreté impeccable, circulation assez fluide et disciplinée, qui contrastent favorablement avec l'océan d'ordures et l'anarchie de la circulation dans les grandes villes de l'Inde, du Népal ou de Sri Lanka que j'ai surtout fréquentées ces sept dernières années. Plus de discipline aussi qu'au Vietnam où je suis encore passé en 2010.

Mais dès que l'on a dépassé la Second Ring Road (deuxième ceinture) pour entrer dans ce qui fut la Vieille Ville, l'environnement devient très agréable. Comme au Japon, larges avenues commerçantes bordées d'arbres, se coupant à angles droit, et entre lesquelles on trouvent des « hutongs » qui comme les « cho » à Tokyo contrastent par le calme presque rural qui y règne. Alors que je lui parle de ce contraste que l'on observe dans plusieurs pays d'Asie entre la vie des grandes artères et celle des « quartiers », William qui n'en connaît guère que Pékin, semble ne pas comprendre. Nous venons de manger dans un restaurant dai (minorité de la région de Dali) qui se trouve justement dans un hutong et en sortons pour nous diriger vers la grande avenue qui mène de Baixing à la Drum Tower quand un chant de coq, triomphal, éclate soudain dans une cour voisine. Je le regarde et nous éclatons de rire. Il a compris de quoi je voulais parler.


Des tours aussi bien sûr, mais entrecoupées de bâtiments et monuments anciens, d'espaces verts, d'élégantes avenues bordées de petits commerces et de restaurants. Les amateurs de vieilleries ont beaucoup regretté la destruction en vue des Jeux Olympiques de nombreux hutong (quartiers de maisons traditionnelles - si hé yuan - d'un étage organisées autour d'une cour intérieure et abritant souvent plusieurs générations d'une même famille étendue). Les mêmes ironisent sur la reconstruction à l'identique de certains de ces quartiers dans des endroits différents en matériaux plus récents. Je ne suis pas certain que ces reconstitutions ne vieilliront pas bien. Par ailleurs les anciens hutong qui ont échappé à la pelleteuse reviennent à la mode. Les propriétaires les restaurent et les ré-occupent, les exploitent – commerces d'art, galeries, restaurants, salons de thé - ou les revendent de plus en plus cher. Le Alley Garden Hotel où je logeais entre dans cette dernière catégorie.



Luoyang, le 23 septembre 2012

Arrivé hier de Kaifeng, avec détour par Shaolin.

A Kaifeng, je logeais à l'Auberge de Jeunesse de YinBinLu, que je ne peux trop recommander. Les auberges de jeunesse (YHA) représentent sans doute en Chine le meilleur rapport qualité/prix que l'étranger au budget limité puisse y trouver. L'accueil est très amical, le personnel parle anglais mais se prête volontiers à enseigner les rudiments du chinois à qui le désire. Sur la carte, des déjeuners et quelques plats occidentaux. Pour 120 yuan une chambre plus que correcte et un environnement amical et très pratique – 200 m d'un magasin offrant vins européens et chinois (Changyu) de qualité et 300 m du seul endroit de Kaifeng où l'on trouve un café digne de ce nom.

A proximité, j'ai visité le temple taoïste de Yanqing - où j'observe à la dérobée ce qui semble être une séance d'exorcisme ou de psychothérapie de groupe où dans une espèce de transe sans doute induite les gens expriment leurs problèmes en présence de gens du voisinages – ainsi que le très beau site attenant, millénaire, de la Préfecture sur la rive du lac. Dans le Nord-Ouest de la ville parcouru le Pavillon du Dragon (Longting Park) , sur le site du Palais impérial des Song du Nord. Mais, c'est le Dai Xiangguo également proche de l'hôtel de jeunesse qui m'a le plus intéressé. Ce monastère comme celui de Shaolin, remonte au 5e EC et donc à la seconde vague de l'expansion du bouddhisme en Chine, coïncidant à peu près avec l'émergence du ch'an/zen. Je suis donc bien dans cette partie de la Chine où le bouddhisme a vraiment pris son premier essor entre les débuts de l'ère chrétienne et le 5e EC.

Deux heures de voyage entre Kaifeng et Shaolin. Nous sommes quelque 500 km plus vers l'ouest dans cette partie de la Chine qui représente le "Milieu de l'Empire du Milieu". C'est ici dans ce paysage de plaines, de plaines alluviales et de collines limoneuses qu'est née la Chine il y a quelque 4000 ans. Mais à mesure que nous progressons vers l'Ouest le climat devient plus continental donc plus chaud.

Comme je suis prévenu, je ne suis pas trop déçu par l'aspect de foire populaire qu'a pris ce lieu où Bodhidharma a sans doute vécu, qui a vu les débuts du bouddhisme chinois ch'an, ancêtre du zen japonais, et certainement les début des arts martiaux bouddhistes et chinois (kung fu). Un peu l'impression à l'arrivée de me trouver dans une espèce de Lourdes chinois.

Après avoir trouvé à consigner ma valisette et mon sac, je me lance sur la piste qui mène à l'ancien monastère à proprement parler dont je crains qu'il ne reste pas grand chose car on m'a dit que Shaolin n'est plus qu'une vaste école de kung fu gérée par l'état et le PC chinois. Plusieurs milliers d'étudiants, chinois et étrangers, s'y forment à la discipline initiée, prétend la tradition, par Bodhidharma lui-même. En chemin vers le monastère, j'entrevois d'ailleurs derrière les arbres des bâtiments assez gris, et décrépis qui ont l'air plus l'air de de casernes que d'installations monastiques. C'est sans doute là que sont hébergés les élèves.

Après 45' de marche j'arrive au monastère, dont la première édification remonte au 5e EC. Les bâtiments actuels ne remontent qu'au 14e- 15e siècle, donc aux Ming tardifs ou aux premiers Ching.
Ils n'en sont pas moins encore très impressionnants. Et contrairement à ma crainte nous ne sommes pas accueilli par des cerbères du PC mais par de vrais moines. Il y a en a donc encore. Le grand nombre de touristes n'empêche pas l'endroit - enfilade de cours escaladant les flancs de la colline, consacrées à des incarnations de plus en plus raffinées de la bouddhéité, la dernière étant Samanthabadhra, si je me rappelle bien, et chacune de ces cours dominée par un pavillon monumental à toit s'incurvant aux extrémités - .de produire une impression puissante. J'en arrive à pardonner aux moines, un peu transformés il est vrai en boutiquiers, embusqués qu'ils sont dans leurs échoppes à chacun des niveaux du site, à tenter de fourguer leur camelote au croyant.

Mais ce sont, doit m'apprendre un de leurs élèves Ougandais et francophone, d'authentiques moines dont plusieurs pratiquent aussi le kung fu de Shaolin et certains l'enseignent.

Avec Shaolin, je continue donc ce pèlerinage longtemps reporté, depuis l'époque où en 1981, plus de 30 ans, le professeur Shi nous guidait dans la traduction du chinois des Biographies de moines illustres, et j'entendis pour la première fois mentionner le nom de Luoyang et celui du Monastère du Cheval Blanc, premier monastère bouddhiste en Chine, que je vais visiter après-demain.

Entre Kaifeng et Luoyang, vu deux mosquées flambant neuves dans cette partie de la Chine pourtant assez éloignée des régions où les Hui sont majoritaires ou représentent d'importantes minorités.

Luoyang, mardi 25 septembre 2012

Arrivé samedi 22 en fin d'après-midi, et passé les deux premiers jours à trouver mes repères – banques, restaurants, magasins, espaces pour la marche post-prandiale , exercice indispensable à la gestion de mon diabète - aux alentours de l'auberge de jeunesse sur West Zonghzhou Lu à côté de l'église.

Luoyang est située au centre de ce qui fut sans doute le berceau le plus ancien de la civilisation chinoise puisqu'à proximité du site de Er Li Tou où furent identifiés des restes de ce qui fut sans doute la plus ancienne « dynastie », celle des Xia (2200-1700) antérieure même à celle des Shang (1700-1100) dont le centre se trouve plus à l'Est du Henan, à Anyang. Les Xia, encore à moitié mythologique succèdent immédiatement aux souverains archétypaux, partie génies, partie héros, partie dieux à composante animale (boeufs ou dragons) liés aux inventions fondatrice de la civilisation, pêche, chasse, élevage, agriculture et écriture : la déesse Nügua, tête humaine et queue de dragon créa l'homme à partir d'argile ; Fuxi, son époux, également mi-humain mi-dragon fut le premier chasseur, pêcheur et éleveur. Le dieu à tête de boeuf Shennong fonda l'agriculture et la pharmacopée végétale. Le Premier empereur archétypal Huang Di inventa la poterie, le calendrier les bateaux et les armures ; Shun inventa le pinceau avant d'abdiquer en faveur de Yu premier empereur Xia.

Dimanche visité le musée de la vie populaire locale (retrouver le nom exact) et les quelques rues anciennes ou reconstituées juste derrière l'hôtel et parallèlement à West Zhongzhou. Marquée par deux portes anciennes au niveau d'anciennes fortifications et de douves cette rue rectiligne courant d'Est en Ouest est tout ce qui reste de ce site urbain probablement quadri ou tri-millénaire. Les seuls vestiges réellement préservés sont la Pagode du Cheval Blanc et le petit monastère voisin de Qiyun (69 EC) – actuellement une « nonnerie » - où résidèrent les premiers missionnaires bouddhistes en Inde, Kasypa Matanga (She Mo Teng) et Dharmaraksha (vers 64-69) traducteurs ou compilateurs du Soutra en 42 sections qui représente la première oeuvre de la littérature bouddhiste chinoise. Le Parthe (Iranien) An Shi Gao, y arriva en 148 EC. Ce premier traducteur mentionné comme tel par les sources chinoises est un sarvastivâdin, il traduit surtout des passages d'oeuvres sanscrites portant sur les doctrines fondamentales du bouddhisme, sur la méditation et l'abhidharma. Mais aucun texte mahâyâna. Peu après lui un laïc, également parthe, appelé An Xuan traduisit avec l'aide du Chinois Yan Fotiao le texte mahāyāna Ugraparipṛcchā-sūtra (en chinois Fajing jing, Taishō no. 322) vers 181 EC.

Trois siècles donc - alors que mahayana et theravada n'étaient pas encore clairement distincts - avant le célèbre Kumarajiva (344-313, mort à Chang'an/Xi'an, et qui de sarvastivadin devint madhyamaka) premier traducteur important de textes sanscrits vers le chinois et cinq siècles avant le moine voyageur, importateur d'écritures sanscrites et traducteur, Xuan Zang (Luoyang c. 596/602 – Chang'an/ Xi'an 664).

Un peu d'émotion en repensant à mon vieux maître le professeur Shi, à l'Université catholique de Louvain, de qui j'ai entendu pour la première fois tous ces noms de lieu et de personnages célèbres. Me rappelle aussi son anti-cléricalisme sans complexe, qualifiant d'ayatollah  les professeurs de l'Institut de théologie – qui contrôlait quand même un peu le contenu des cours de l'Institut orientaliste. « Sale curé ! » l'entendis-je un jour exploser.

Agréablement surpris de voir qu'une partie du domaine de la Pagode est consacrée au « bouddhisme international » et que des temples de style thaï, malay et indien (2007) y ont déjà été édifiés. Ce dernier bâti en un pierre rose (granit?) combine de manière assez réussie une conception globalement moderne avec des élément stylistiques de Sanchi. Il est le fruit d'une initiative de Atal Bihari Vajpayee lorsque Premier indien en 2004 venu s'incliner sur les tombes de deux missionaires indiens Kasyapa Matanga (ShiMoTeng) et Dharmaraksha (Zhu Fa Lan) traducteurs ou compilateurs du Soutra en 42 sections, premier texte de la littérature bouddhiste chinoise.

Les photos d'un abbé assez jeune encore, flanqué bien sûr d'officiels du régime, en compagnie de diplomates et personnalités étrangères, me font penser que contrairement à ma crainte le régime est conscient du rôle que la Chine peut jouer dans la défense et illustration d'un bouddhisme global.

Xi'an le 27 septembre 2012

Le lendemain de mon arrivée à Luoyang, alors que j'étais attablé devant mon petit dej, je vois un jeune en costume de football qui à peine entré me fixe d'un air interrogateur. Il se dirige vers moi et me demande s'il peut s'asseoir. J'acquiesce.

Je devais le retrouver chaque jour pendant cinq jours deux heures de préparation à son examen d'anglais en octobre. Il insiste aussi pour accompagner ma promenade post-prandiale du soir au cours de laquelle nous parlons à bâtons rompus. Il me raconte sa vie et m'interroge sur la mienne. D'abord un peu surpris, comme je n'ai pas grand-chose d'autre à faire de mes soirées et que ce jeune de 21 ans m'étonne non seulement par son culot et son énergie mais par sa culture et son intelligence, je me laisse prendre à son jeu.

Haishan est originaire de la ville historique de Quanzhou au Fujian, face à Taïwan, à l'extrémité orientale de la Route de la Soie, me dit-il. Il fait un baccalauréat en anglais/histoire à l'Université de Luoyang.

Je suis un peu sur mes gardes car le gars n'est pas timide et je sais que beaucoup de jeunes Chinois, comme de Vietnamiens, cherchent à s'expatrier et que tous les moyens sont bons pour arriver à leur fins, y compris le charme, les sentiments ou l'intimidation. Il essaie effectivement un peu des trois mais avec tellement de doigté, d'habileté et finalement de gentillesse et d'intelligence que j'entre dans son jeu sans toutefois m'y laisser prendre. Il ne mentionne d'ailleurs qu'il serait prêt à étudier en Belgique que le dernier jour, la veille de mon départ.

Lorsqu'il m'accompagnera le 27 au matin à la gare de Luoyang pour m'aider à prendre le train rapide (2 heures au lieu de six, vitesse moyenne 200 km/heure) je sais beaucoup de lui : son père ne l'a guère marqué, il doit beaucoup à sa mère, institutrice, il n'aime pas le communisme, s'intéresse surtout à l'histoire, à la littérature, à la philosophie, à l'économie et à la politique, sans être nul en sciences et en maths, et a de grands projets ....

De moi il a assez compris pour m'avoir dit la veille au cours de notre dernière promenade nocturne : «  in fact, you are an old beatnik , like Steve Jobs», car il a aussi lu On the Road de Jack Kerouac, sait d'où viennent les bouddhistes occidentaux et qu'ils n'ont pas grand-chose à voir avec les bouddhistes asiatiques. Il sait même qui est Epicure. Lui-même se définit comme athée ...

J'aime son pragmatisme confinant au cynisme. A la fin du modeste repas que nous partageons dans un restau du quartier la veille de mon départ, comme je sors ma seringue pour m'injecter ma dose d'insuline, sans prendre la peine d'aller au toilettes – il n'y a pas grand monde dans le restau et personne ne me remarque – et lui dis « de toute manière la plupart des gens sont aveugles, ils ne voient du réel que ce qu'ils désirent ou ce qui le effraie », il me commente hilare «  si t 'étais une belle fille il t'auraient vu ». Un peu plus tard, comme nous marchons vers l'hôtel, il s'arrête et me demande

  • Do you think I am handsome ? 
  • You all right » réponds-je, après l'avoir considéré de haut en bas.
  • You must have been all right too when you were younger », ajoute-t-il, aimable.

Non content d'être intelligent, beau et beau-parleur, il est bon au foot et joue de la guitare. Les filles lui courent après, me confie-t-il. C'est pour cela qu'il vit à l'hôtel plutôt qu'à l'université. Sinon, il ne pourrait pas travailler ...

*


Le mardi 25, j'ai visité le célèbre site de Longmen. Indépendamment des grottes et du superbe Vairocana qui domine la rive ouest de la rivière Yi, l'environnement est grandiose et superbement aménagé et je commence à me dire que les guides de voyage et les bouddhistes occidentaux sont trop sévères vis-à-vis de la Chine communiste et de l'utilisation, il est vrai un rien trop commerciale, je l'admets, de sa tradition bouddhiste. Après tout, je n'ai jamais vu La Mecque, mais ce n'est pas pire que Rome et c'est sans doute mieux que Lourdes.

Beaucoup aimé aussi le monastère de Xiangshan sur la rive Est, où l'on peut aussi visiter la superbe maison où eut lieu en 1939 une réunion présidée par Jiang Jieshi (Chiang Kaishek) au cours de laquelle fut décidée la stratégie visant à déloger les forces maoïstes du Nord-Ouest (Shaanxi, Gansu, Ningxia) alors que plusieurs de ses généraux travaillaient déjà avec les communistes. Beaucoup aimé le Bouddha polychrome du 17e siècle qui siège dans le temple.

Xi'an

L'après-midi même de mon arrivée après un lunch léger et une courte sieste je visite la fameuse Dayan Pagoda – Wild Goose Pagoda/ Pagode de l'Oie Sauvage – où furent entreposées les écritures en sanscrit et autres langues indiennes ramenée de l'Inde par Xuan Zang au 7e siècle..

Le 28 septembre 2012

Excellent petit déjeuner et premier relevé de mon courrier électronique grâce au réseau du King Coffee. Puis je prends le bus K609 en direction du quartier musulman situé derrière la Drum Tower. Je me rends compte que cette ligne passe à proximité de la Small Wild Goose Pagoda (Xiaoyan Da) où sont entreposées des écritures sanscrites rapportées par des voyageurs postérieurs ( 8e siècle EC) à Xuan Zang et où vécut le traducteur Yi Jing, également de cette époque relativement tardive.

Visite aussi le superbe musée moderne attenant à la pagode. Collection de pièces de jade et d'or mais surtout de buddhas remontant au tout début de la pénétration du bouddhisme dans la région, venant du Gansu, du Qinghai et du Turkestan chinois. Emu de voir la progression de ce premier art bouddhiste chinois depuis ses débuts à l'époque des Jin et des Wei, art encore rudimentaire et naïf mais marqué de la sincérité et de l'enthousiasme de ces premiers croyants qui comme les bouddhistes occidentaux sans doute trouvaient surtout dans cette foi nouvelle - qu'ils ne comprenaient que partiellement, et même erronément - ce qu'ils y cherchaient et en retenaient sans doute surtout la technique de la méditation et bizarrement la croyance en une âme et en une survie, fût-ce sur la forme de la transmigration. Dans cette culture encore marquée par l'animisme chaque individu a simultanément plusieurs « âmes » et les seules formes de survie individuelle, dans le sens où nous l'entendons, envisagées jusque-là était la survie biologique qu'implique la procréation – d'où sa sacralisation et le culte des ancêtres. Avec le bouddhisme, le débat sur l'existence d'une âme individuelle – âtman – que le bouddhisme indien résout d'ailleurs par la négation de l'âme (anâtman) entre dans la conscience chinoise. Paradoxalement, à l'occasion de ce débat, c'est surtout la découverte du concept d'âme qui va retenir l'attention des Chinois, et le bouddhisme chinois des débuts favorisera l'idée d'une âme qui transmigre ainsi que celui d'une « conscience universelle ». Alors que, paradoxalement encore, ce qui dans le bouddhisme intéresse surtout les Occidentaux est son athéisme et sans négation d'une âme individuelle « substantielle » et éternelle.

En bref, les vagues successives d'expansion du bouddhisme, en Chine d'abord, en Occident ensuite, reposent sur des malentendus, parfois savamment entretenus par les propagateurs de la foi, l'essentiel étant sans doute pour eux, en harmonie avec le pragmatisme du Bouddha, de pratiquer la méditation.

Pour revenir à l'art bouddhiste chinois, on le voit ensuite évoluer à l'époque des Zhou et des Qin postérieurs puis des Sui pour se raffiner alors qu'il pénètre l'aristocratie, puis sombrer dans le maniérisme avec les Tangs puis les Song.

On trouve déjà à Xi'an ou aux alentours des pagodes représentant toutes les sectes qui vont proliférer au cours des siècles suivants et constituer l'arbre du « bouddhisme chinois », bouddhisme nouveau, très différent du bouddhisme indien des origines, et qui va marquer tous les pays satellites de la Chine avant de marquer également le bouddhisme occidental quelque 2 000 ans plus tard.

*

Je me dirige ensuite vers la Drum Tower qui marque le centre de la ville ancienne, au nord-est duquel se trouve le quartier musulman et la grande mosquée, remontant elle aussi au 7e siècle EC.
Je m'y aventure après une salade de poulet, frites au Mac Donald qui en barre l'entrée.

Quelques femmes portant hijab, et des restaurants visiblement halal. Pas mal de touristes occidentaux ou du Moyen-Orient aussi. Ne trouvant pas la grande mosquée, je m'adresse à un groupe de touristes hollandais dont la guide – chinoise – me dit de les suivre. Je suis donc le drapeau hollandais en échangeant quelques mots avec des Limbourgeois, peut-être des parents puisque mes ancêtres paternels viennent de la région de Maastricht. Ayant trouvé la mosquée, je les remercie et explore seul l'endroit.

Je dois reconnaître que mes dispositions ne sont pas bienveillantes. Je remarque que le minaret, de style chinois comme d'ailleurs tout l'ensemble architectural, jardins, bains et salle de prière – interdite aux infidèles – est très court et trapu. Sans doute les dynasties – Tang, Song, Yuan, Ming et la dernière, Ching, sous laquelle la mosquée fut reconstruite, veillèrent-t-il toujours à ce que le priapisme propre à cette religion ne puisse trop ouvertement se développer.

Le guide chinois d'un autre groupe, composé d'Allemands, me dit que les musulmans chinois lisent le Coran et prient en arabe et en chinois. Allah se dit également « allah » en chinois.

Globalement l'ambiance du quartier sans être agressive ou tendue n'est pas particulièrement chaleureuse et sachant ce que je voulais savoir, je quitte l'endroit sans regret.

Pour la première fois depuis mon arrivée en Chine, le 12 septembre, les soirées commencent à fraîchir. Nous sommes il est vrai à quelque 1500 km de la côte au centre de la Chine historique, beaucoup plus continental que Pékin, et les montagnes de l'Ouest sont relativement proches.

Les chats chinois dédaignent-ils le lait ? J'ai eu beau insister auprès de l'un d'eux pour qu'il accepte un godet de lait reçu dans un café. Rien n'y fit ... J'en conclus que les Chinois, qu'ils soients hommes ou chats, n'aiment pas le lait et les produits laitiers. Le réceptioniste du Jano Belgian Guesthouse, sous les remparts sud de la vielle ville, près de Nan Men donc, me dit que les chats chinois aiment en général le lait. Ce chat-, insiste-t-il, ne l'aime pas.


Kaifeng. La Chine, le pétrole, l'islam et la Russie


     Journal Chine 2012

Kaifeng le 19 septembre 2012

Une semaine exactement après mon arrivée à Pékin, où je logeais au Alley Garden Hotel dans un hutong proche du Temple des Lamas.

Mes motivations pour ce troisième voyage en Chine, alors que j'approche les 68 ans.

Après ma découverte du monde chinois en 1983 – Taiwan, Hong Kong, Shenzhen – et un voyage à Shanghaï, Nanjing, Suzhou, Hangzhou, Yangzhou en 1999 ou 2000 alors que je travaillais à Hanoï, je voulais voir le Nord, Pékin, les anciennes capitales du Fleuve jaune – Kaifeng, Luoyang, Xi'an – et si possible faire une incursion dans l'Ouest et le Sud-Ouest, avant de faire un saut à Bangkok pour y saluer Thierry Theuwissen et de revenir à Pékin aux environs du 5 novembre en vue d'un possible retour en Belgique le 15 novembre, à moins que je ne continue mon séjour en Asie jusqu'à l'année prochaine.

Un autre thème guide cependant cette troisième aventure chinoise : alors que les relations entre l'Occident et le monde musulman s'enveniment après la mise en ligne sur YouTube de The Innocence of Muslims, au point de voir les ambassades US du Caire et de Benghazi détruites par des groupes armés spontanés, et Chris Stevens, ambassadeur américain à Benghazi, pourtant « arabophile » et ayant contribué à la récente chute de Khadafi, trouvé inconscient dans l'ambassade en flamme et peut-être achevé par ses « sauveteurs », je veux tenter d'évaluer la qualité des relations entre les Han et l'islam et plus particulièrement la minorité musulmane des Hui présente, en dehors de leur berceau du Ningxia, dans toute la Chine, entre autres à Pékin et Kaifeng.

Dans un article du China Daily (15 septembre) , intitulé Washington needs to rethink [its Middle-East] policies, citant Yao Kuangyi, ancien ambassadeur de Chine en Turquie, Zhou Wa ne déguise pas un sentiment sans doute partagé par beaucoup en Chine : Washington et l'Occident se sont trompés en cherchant à s'attirer les sympathies des populations du Moyen-Orient arabe par leur support aux révolutions du Printemps arabe. L'Occident aurait en fait été utilisé par les extrémistes islamistes.

Premier contact avec Pékin très positif, grâce à l'intermédiation de William Peter-Riquet, Français ami de Louise Favre, et y travaillant dans l'hôtellerie depuis trois ans. Il m'a trouvé un hôtel bien situé, dans un quartier calme du centre de la ville, et pas trop cher. 170 Y la nuitée, soit un plus de 20€. Il s'agit en fait d'une de ces maisons (si hé yuan) typique du vieux Pékin, organisées autour d'une ou deux cours intérieures communiquant. Un arbre dans chacune des deux cours où le jour de mon arrivée souffle une brise tiède très agréable. Des plantes vertes, deux chats et un personnel très correct. Leur anglais est élémentaire mais j'arrive quand même à interviewer l'un d'entre eux sur l'islam et les Hui.

Il semble vouloir me dire que les musulmans chinois sont chinois avant tout, et très différents des Arabes. Ils vivent entre eux me dit-il mais ne sont pas de ce point de vue différents d'autres minorités chinoises et leurs femmes ne portent ni hijab ni niqab - le voile complet. Mais, semble-il vouloir ajouter, si elles le voulaient, elles le pourraient. En Chine, on s'habille comme on veut ...

La Chine a déjà fait des concessions considérables à cette minorité – droit d'avoir plus d'un enfant – et pourrait en faire d'avantage, dans le but bien sûr, comme l'Occident le fit il y a quarante ans, de s'assurer la sécurité des approvisionnements pétroliers. D'après le China Daily (13 septembre) des accords seraient en voie d'être conclus en vue d'ouvrir le Ningxia, précisément, à des investissements arabes du Golfe. Pour faire face à la crise financière et à la chute des exportations vers les USA et l'UE, d'après les déclarations de son Vice-Premier, Li Keqiang au cours du troisième China-Arab States Economic and Trade Forum à Yinchuan, capitale de la région autonome du Ningxia – où vivent 2,2 millions de musulmans Hui – la Chine envisage d'ouvrir plus largement ses régions occidentales en y permettant «  an inland opening-up trial zone ... and a comprehensive tax-free zone » dans les domaines de la finance, des énergies renouvelables et des produits chimiques ; en échange la Chine investirait dans les technologies, les infrastructures et la modernisation de l'agriculture dans les pays arabes.

La coopération entre la Chine et les six pays arabes du Golfe remonte à 2004 avec l'inauguration des China-GCC (Gulf Cooperation Council) free tradee agreements talks. En huit ans et cinq rounds les échanges ont augmenté de 44,5 % pour atteindre 133,8 milliards ; les exportations chinoises vers ces pays auraient augmenté de 30% et leurs importations de ces pays de 53,8%. La Chine et les pays du Golfe voudraient atteindre les 300 milliards de dollars d'échange en 2014.

Le China Daily du 18 septembre cite Jamila Matar, directeur du Département de l'énergie de la Ligue notant que « la relation entre les pays arabes et l'Occident est instable. Le moment serait venu d'intensifier la coopération entre la Chine et les pays de la Ligue arabe en matière d'énergie – pétrole et gaz – étant donné l'accélération de la production du gaz de schiste aux USA – couvrant déjà 35% de leurs besoins – alors que la Chine aura de plus en plus besoin du pétrole et du gaz arabes » (Third China-League of Arab States Energy Cooperation Conference, Yinchuan, Ningxia autonomous region).

La China National Petroleum Corp (CNPC) investit déjà dans 22 projets (raffineries) de production de pétrole et gaz dans les pays arabes, dont sept au Soudan, un en Irak, et des perspectives en Algérie, laquelle a surtout travaillé avec des compagnies occidentales. Sinopec (China Petrochemical Corp) aurait coopéré avec treize pays de la Ligue des pays arabes. La Chine aurait en 2011 importé de ces pays 54% de son pétrole brut.

Dans le même numéro du China Daily, He Wenping, director of the African Studies Section of the Chinese Academy of Social Sciences, analysant les causes, multiples de l'animosité entre le monde musulman et l'Occident, parmi celles, proches, objectives et reconnues par tout le monde, en mentionne une qui l'est moins : un prétendu « sentiment inhérent de supériorité culturelle et un manque de tolérance pour les autres religions ». Sur ce point, He Wenping est soit mal informé soit de mauvaise foi. Il continue notant que l'Islam représente 1,5 milliard de fidèle, dépassant ainsi le catholicisme. On comprend à cette remarque l'obsession « catholique » de la Chine et son opposition à une réelle autonomie de l'Église catholique en Chine. Celle-ci représente – représentait ? - effectivement une puissance redoutable que nous, nés dans des pays de culture catholique, ne percevons parfois pas clairement. On peut comprendre qu'un pays comme la Chine où l'Etat a traditionnellement été considéré comme une expression du divin ne veuille pas d'une telle concurrence incontrôlée. La Chine contrôlerait-elle mieux sans perdre son identité un islam où le pouvoir est beaucoup plus diffus ou moins centralisé, se partageant entre quelques oulémas, universités et least but not least chefs de clans ou de tribus. Ce dernier lieu de pouvoir trait donne d'ailleurs à l'islam, sunnite surtout, des traits qui lui sont communs avec les associations mafieuses.

D'après He Wen Ping, l'islam serait vu par l'Occident comme une religion extrémiste et cela «  surtout depuis 11 septembre 2001 ». L'Occident devrait « apprendre à respecter les autres civilisations, cultures et religions ». Il termine sa copie en mentionnant l'étonnement de Hillary Clinton : comment est-il possible que des gens que nous avons aidé à libérer, dans une ville que nous avons aidé à sauver de la destruction, s'en prennent à nous au point de tuer et sans doute profaner la dépouille de notre ambassadeur ?

Pour le Chinois la réponse est simple : cela n'est que rétribution prévisible pour avoir aidé la « démocratisation » dans un pays qui n'était pas mûr. Il ne peut ou ne veut, pas plus que Clinton peut-être, voir la véritable source de l'insupportable paradoxe : le devoir fait aux musulmans de tromper l'infidèle.

Considéré à posteriori, voilà ce qui s'est en fait passé : les Lybiens et Egyptiens, en bons musulmans qu'ils sont pour la majorité, ont fait payer les frais de leur libération – ont utilisé l'Occident – pour se débarrasser des dictateurs qui barraient la voie à la « démocratie » islamique.En s'en prenant à leurs dictateurs, ils s'en prenaient déjà à l'Occident mais, perversité suprême, ils utilisaient l'ennemi ultime (l'Occident) pour éliminer l'ennemi proche (les dictateurs).

*

Je me rends vite compte que mes habitudes en tant qu'utilisateur d'internet vont devoir changer. Pas moyen de me connecter à Facebook et je n'arrive pas à ouvrir certains articles contenant les mots « islam », « racisme », ou « révolution », entre autres. Sur la TL, aucune chaîne étrangère. J'étais prévenu, mais suis quand même un peu étonné. Au Vietnam il y a deux ans, on recevait CNN même si certains programmes étaient censurés.

Kaifeng, le 20 septembre 2012

Je retrouve un numéro du Herald Tribune (11 septembre) lu dans l'avion qui m'amenait à Pékin. Un article intitulé Land-rich Russia lures cash-poor Chinese m'y apprend qu'entre la Russie, riche en terre mais pauvre en hommes et la Chine riche en main d'oeuvre et relativement pauvre en terre, un nouveau type de coopération s'installe. Des investisseurs chinois sont autorisés non seulement à leaser des terres le long de la frontière chinoise du Nord-Est et en Sibérie – où ce sont des exploitations forestières qui dominent - pour y employer de la main d'oeuvre chinoise mais aussi à acheter des terres en Russie centrale jusqu'aux abords de Moscou et de Saint-Pétersbourg où ils emploient des saisonniers chinois dans les cultures céréalières et maraîchères. Cette main d'oeuvre y est payée jusqu'à cinq fois plus qu'en Chine.

La Russie voudrait porter ses échanges avec la la Chine de 80 milliards en 2011 à 200 milliards dans un avenir proche encore indéterminé. Par comparaison les échanges Chine-USA se montaient à 503 milliards en 2011.

S'il y a des incidents entre Russes et Chinois, ils sont relativement peu fréquents. Pas encore d'histoire d'amour, mais d'après plusieurs babouchkas (grand-mères) rencontrées au marché, note le journaliste, Andrew E. Kramer, « Russes et Chinois peuvent coexister paisiblement dans les campagnes russes ».

Les peuples qui échangent leurs femmes – pratiquent le mariage mixte - ne peuvent se faire éternellement la guerre. Or c'est bien le cas tant des Chinois que des Russes post-communistes. Dans ces sociétés foncièrement exogames, une fois les premiers étonnements et premières résistances dépassés, après une ou deux générations, une certaine familiarité s'installe, on s'assoit autour de la même table et en l'absence de tout interdit alimentaire ou autre obstacle légal ou religieux, le processus d'intégration s'entame.

Il y aurait actuellement 400 000 Chinois en Russie, 3,5 % seulement de tous les immigrés venant essentiellement des anciens états soviétiques d'Asie centrale, mais l'immigration chinoise pourrait bien augmenter. N'est-ce pas à souhaiter ?

Envoi groupé le 21/9/12












Going back to China


I have been in China several times, the first time in 1983, to Hong Kong, and then Shenzen when  it still was a big sleepy town. Then at the end of the nineties to Shanghai, Nanjing, Suzhou, Hangzhou, Yangzhou. This time, I visited Beijing and the ancient capital cities of Kaifeng, Luoyang and Xi'an in September before spending October in Thailand and  Lao. Now I am in Hanoi for some days or weeks, I don't know yet, as the Tonkin weather in this part of the year is paradise, and I am in no rush to leave. I take advantage of this pause to put down notes taken in China, Thailand and Laos in September and October. My next destinations are Kunming, Dali, Chengdu and back to Beijing by the end of November.

But the purpose of this tour around East-Asia, as hygiene and safety conditions in India and Nepal  begin to worry me, is not only to find alternative landing pads for my yearly winter migration but also to evaluate where this part of the world stands with regard to Islam and Muslims, as well as whereto it is trending. Of special interest to me, as news and data from China are scarcer on this subject,   is to get a feel of how the Chinese interact with their Muslim minorities, collect opinions of some resident expats, and of the possible impact of intensifying economic relations between China, oil producing middle-eastern countries ,AfPak and Africa on Chinese "public opinion".

Hereafter I will post travel diary entries that, as I had trouble connecting to Blogger in China,  I have already  sent by mail to a selection of correspondents. Those entries are in French.

Theravada Buddhism, State and Violence

Here under  a link to my DEA thesis, in French, on "Theravada Buddhism, violence and the state" (Le bouddhisme theravada, la violence et l'état, 2007) :

http://www.memoireonline.com/09/08/1514/m_le-bouddhisme-theravada-la-violence-et-l-etat.html

and a "résumé"of it,  in English, that was published as an article  in the review Hieron (Copyrights : Hieron, Comenius University, Bratislava, 2012) under the title

Theravada Buddhism, State and Violence: Scriptures, Principles and Realities


This article is a summary of a dissertation on Theravada Buddhism and violence1 presented by Jacques Huynen in June 2007, for the postgraduate DEA Diploma of Advanced Studies2 in History of Religions at the University of Liège, Belgium.
In that dissertation Jacques Huynen attempts to identify and explain the features of religion connoted violence, endemic to this day in countries where Theravada Buddhism prevails. To that effect he explores the textual basis of the Theravada doctrine regarding violence and contrasts it with realities on the terrain to find that fusion of religious, ethnic and/or national identities might represent there a key variable among possible explanation factors for the persistence of that type of conflict in the Theravada world while it has almost completely disappeared from countries where Mahayana prevailed3.
Introduction
Abstention from anger and violence is the most basic tenet of Buddhist ethics. But while Walpola Rahula’s contention that not a single drop of blood has been spilled for the propagation of Buddhism4 can be admitted inasmuch as it never caused massive violence such as the Crusades or Jihad, most recognize now that violence is absent neither from Buddhist societies, nor from the relations between Buddhist countries and even between Buddhist institutions: monks’ sanghas and nikâyas.
Being familiar with Theravada countries where I frequently travel, my interest in the specific features of violence in these countries was triggered by the reading of Buddhism and Violence, edited by Michael Zimmerman (Lumbini International Research Institute, Lumbini, 2006), which covers both Theravada and Mahayana. Intrigued by the fact that the phenomenon of violence in which religious factors play a role has almost completely disappeared from the Mahayana since the end of the Middle Age (14th CE), and completely since the end of the Vietnam War5, I set out to investigate and extricate some of the reasons why until present, religion connoted violence has remained a sad characteristic of Theravada countries and societies. Putting aside the international conflicts between them as states, still recently Sri Lanka, Myanmar, Thailand, all went through bouts of internecine violence, either motivated by, or in which religion enters as a variable. The independence of Sri Lanka in 1948 was soon followed by social conflicts and a war, civil and military, between the mostly Buddhists Sinhalese and Christian or Hindu Tamils, that is still going on. In Myanmar, hostility between the Burmese Buddhist majority and religious or ethnic minorities remains chronic. And in the deep South of Thailand the unresolved irredentism of three Muslim provinces, almost forgotten after two decades of that country’s fast development, has resurfaced over the last decade and is making headlines again.
While in East-Asia countries such as Japan, Korea, China and Taiwan have as nations and states, been at war with some of their neighbors, religion was conspicuously absent from these international conflict motives, which were essentially political, territorial or economical. Besides, these countries’ economical development continues unabated, leaving on their Southwestern flank a Theravada world stranded in the throes of underdevelopment, poverty, civil war, coups d’état, a situation that evokes the troublesome Balkans lagging behind its more developed and stable European neighboring states.
My dissertation consists of two main parts (not counting the Introduction and Conclusion):
  1. Les Textes, dedicated to the doctrinal stand of Pâli literature with regard to violence, incidentally compared with that of Mahayana literature. In that section I translated into French passages from four suttas (Aggañña, Cakkavatti and Mahâparinibbâna and Adhammika), three Jâtakas (Sumangala, Bikkhâparampara and Mûgapakkha) and from the extra-canonical Mahâvamsa, dealing with the State, violence and punishment.
  2. La Réalité in which, drawing from more recent historical and sociological secondary sources, in English and French, as well as a long familiarity with Buddhist milieus in that part of the world, I compare the doctrinal stand of the Canon regarding violence with reality both past and present on the ground, in and between countries where Theravada Buddhism has been the dominant religious tradition for various lengths of time, more than 2000 years in Sri Lanka, barely one thousand in Indochina.
This Summary will follow the same pattern. I will in the first part deal with the textual Pâli tradition relevant to our subject, delineating the ideological matrix that Collins has coined the Pâli imaginaire6 and in the second part try to track the ideology’s various avatars through the history of the Theravada world.
I. The textual tradition
The basic political philosophy and mythology of Theravada Buddhism is contained in three suttas, of which I translated long passages: the Aggañña Sutta which puts a description of the genesis of the state and monarchy in the Buddha’s mouth, the Mahâparinibbâna, which many think shows the Buddha’s preference for a republican system, and the Cakkavatti Sutta, where we find the picture of the ideal cakkavatti or Universal Monarch.
I will hereafter summarize the content of these three texts.
The Aggañña Sutta
Consistently with Buddhist psychological and ethical views, crime and violence stem out of envy, rooted in desire or craving. At the beginning says this sutta, human beings were asexual and almost purely «mind made, feeding on joy, self-luminous, floating in ether, dwelling in glory»:
mayam hi pubbe manomayā ahumha pīti­-bhakkā sayam­-pabhā antalikkha­-carā subhaṭṭhāyino (DN III, 27.18 /PTS iii 92)
It is craving for a special food, which suddenly appeared on the surface of the primeval waters that precipitated the whole subsequent unhappy evolution, giving birth in sequence to differences in physical appearance, to craving for sex, then – in order to conceal sexual shame – to craving for private property of land and the ensuing endemic conflicts. It is in order to put an end to these that the idea arose in humans to choose among themselves the most handsome and charismatic man as a leader, to entrust him with keeping order, admonishing, judging and punishing, and repay him with a share of rice, the first taxes :
[Y]an’ nūna mayam ekam sattam sammaneyyāma. So no sammā khīyitabbam khīyeyya, sammā garahitabbam garaheyya, sammā-pabbājetabbam pabbājeyya. Mayam pan’assa sālīnam bhāgam anupadassāmāti (DN 27.20/PTS iii 94)
which I translate : «What about electing one [human] being who when it is right to denounce, would denounce, when it is right to scold, would scold, and when it is right to banish, would banish ? And we would let him have a share of [our] rice»


The Mahâparinibbâna
At the beginning of this most famous sutta, we find a passage7 in which many scholars have seen the advocacy of a republican or democratic system of government.
The issue of violence is not explicitly addressed in it but it shares with the Aggañña a rather democratic bent, and states that governance should be based on consensus. It also contrasts sharply with that of the following Cakkavatti Sutta where monarchy is clearly hereditary and the ideal king’s features, despite his stated duty to consult experts before taking decisions, is rather that of an enlightened despot.
The Cakkavattî Sutta
This Sutta8 states that the power of the cakkavatti must be deserved, that it can be inherited but not automatically, that it results from a sort of Heaven’s mandate of which the icon, appearing in the sky at every beginning of a new reign, is the cakkaratana, which I translate «jewel shaped as a helm». Some of the characteristics of the cakkavatti’s power is that it is based on the dhamma9 [dhammena : through the «rule of law» ] and is spread through persuasion without resorting to violence (asatthena). It is precisely the failure of the eighth successor to Dalhanemi, the archetypal cakkavatti, to consult with his council of experts, and the mistakes he commits thereafter, that keeps the cakkaratana from appearing in the sky, obliges the king to resort to violence in order to maintain public order and precipitates a cycle of decadence, several thousands of years long, leading to a state of violent anarchy reaching down to the intermediate «sword-time period», lasting one week, during which humans will consider each other as mere beasts and preys. The survivors, understanding the cause of their sorry state, will then gradually adopt rules leading back to healthier public behavior and initiating an upwards trend culminating with the appearance of a new ideal cakkavatti, Samkha, soon followed by Metteyya, the Buddha to come, here mentioned for the first time in the Pâli literature10.

If one of the main lessons of this sutta may be summarized as being that crime may not be rewarded but that punishment must be proportionate to its severity, and that violent punishment is counterproductive, the textual tradition, so far, seems to confirm the commonly accepted image of Buddhism as promoting a most pacifist political philosophy. Let us turn now to the Jâtakas.
The Jâtakas
Although numerous violent episodes occur in these tales of the Buddha’s former births, the three jâtakas I selected will not contradict the overall picture left by the three foregoing suttas. One of them, the Mûgapakkha Jâtaka (Ja, 538, 15–25) even seems to push non-violent ethics a bit further, to the fringe of an utopia where no salvation is possible but in a society where everyone is a monk, non-violent by definition.
Let us start with the Sumangala (Ja 420, 3:441-2), which teaches that a king should not make a decision or pronounce a judgment when angry — quite reasonable even for non-Buddhists. A bit more utopian is the Bhikkhâparampara Jâtaka (Ja 496,13) which shows that in a kingdom ruled by a dhammarâja (king following the dhamma) courts of justice become empty and redundant. An other text, the Adhammika Sutta11, although not a jâtaka, follows the same utopian inspiration since it predicts that the respect or non-respect of the Law or Dhamma by rulers impacts on Nature itself, climatic phenomena and the course of stars and planets. Finally, the Mûgapakkha Jâtaka tells us the story of Prince Temiya who was reborn in a royal family where he himself had already been king in a former life. The baby, after having seen his father cruelly punishing four thieves, remembered that his former experience as a king had caused him to spend eighty thousand years in the Ussada purgatory. The overall message is that the status of king — that can always lead its incumbent to having to exert violence — is incompatible with hope for salvation. Very frightened by the prospect of having to go back to the Ussada purgatory if he were to be king again, after growing up, he escapes to the wilderness and becomes a hermit. The king finds his whereabouts and impressed by his son’s superior intelligence, converts to the Dhamma with all his family, becomes a hermit himself, and opens the borders of his kingdom to all the neighboring kings. All become hermits. Peace and harmony settle in before spreading around the world.
With the Mûgapakkha we reach the utopian acme of what Collins calls the Pâli imaginaire. For Collins (p. 565) «The universal Buddhist Dhamma has either to inscribe violence into oneself (no easy task, given the basic postulates of its soteriology) or to push it outside, and in so doing risk pushing itself out of any sphere of relevance to productive and reproductive communities.»
What happened between the canonical texts we just read — probably composed before the first century CE and put to writing in Sri Lanka around the beginning of the common era — and another, non-canonical text, that dates? much later (fifth century CE), the Mahâvamsa or Ceylon’s Great Chronicle, in which murdering heretics is not only condoned but, in certain circumstances, recommended?
Most probably, after being for about a thousand years, from Asoka (3rd century BCE) to Harsa (7th century CE)12 at different times and in different parts of India the dominant, or one of the most important religions, starting with the Hindu Renaissance of the 5th century CE, pressure began to be felt on Ceylonese Theravada from both Tamil Shivaist revivalism in South India and a Mahayana offensive. As Collins (ibidem) puts it, «The pre-modern pâli imaginaire was an elite ideology», and that of a protected elite indeed, which suddenly had to confront challenges it was not used to.
The Mahâvamsa
While in Mahâyana literature two canonical texts, the Mahâparinirvâna Sutra and the Tibetan Kala Cakra allow and even advise violence against the icchantikas or enemies of the Dharma13, in the Theravada canonical literature violence remains absolutely forbidden. It is not before the 5th century CE that a non-canonical Chronicle, the Mahâvamsa14, retrospectively absolves king Dutthagamini (2nd century BCE) having massacred thousands in order to repel an invasion of Tamil heretics.
In the book XXVth of the Mahâvamsa, we read that after the battle, King Dutthagamani, resting in a splendid environment, is supposed to celebrate his victory over the Tamil King, but crushed by a feeling of guilt for having killed so many human beings, he feels no joy at the thought of his achievement. Eight arhats, or completely enlightened monks fly through the air and land on his terrace to comfort him. Dutthagamani tells the arhats of his worries. The arhats reply that he should not feel guilt, for he killed only «one man and a half», one who was a Buddhist monk, and one who was a Buddhist layman having taken the five minimum vows. The remaining, as heretics or non-Buddhists, were mere animals. Furthermore, as he fought to defend the Dhamma and the monks’ Sangha, when he dies he will go to the Tusita heaven and remain there in the company of Metteyya, the Buddha to come.
In book XXXVII (26–31) relating to a much later event, probably occurring a short time before the Chronicle itself was put to writing, it is the murder of two Mahayana followers that is excused.
II. Reality
Historical outline of Theravada
India
Theravada, as a school distinct from the other 18 most ancient Hinayana schools, originated in India at the 3rd Council of Pataliputra (Patna), under Asoka, in the 3rd century BCE. It benefited from Asoka’s patronage and spread widely over all the parts of India controlled by the Mauryas and beyond, but nowhere was it ever the only «official religion». By the 7th century CE, it had almost disappeared from the subcontinent, yielding ground to the Hindu Renaissance initiated with the Guptas, to the progress of Mahâyana Buddhism, and soon of Islam, except for a few pockets in Kalinga, Orissa and, most notably, Ceylon.
Ceylon
When Asoka’s son Mahinda reached Ceylon, the island was probably less densely colonized by Aryans than Northern India and therefore brahmanisation and caste structure must have been shallower there. Consequently it may have been easier for Buddhism to impregnate a society that was still predominantly tribal and animistic. The Aryan nobility tracing back to Vijaya may have found Buddhism more efficient than Brahmanism for social integration. In any case, the concept of state in Ceylon must have been from the outset, or very early on, that of a Buddhist state which did not have to seriously compromise with or accommodate to the brahmanical state model.
Theravada became, and still is, the majority religion in Ceylon, that of the Sinhalese. The first war between a Sinhala kingdom and Northern Tamils who had kept their identity and language is the one, involving Dutthagamani that we just mentioned in the above section. It is presented as a reaction not to migration but to an invasion since the city of Anurâdhapura had been taken. About seven centuries later (5th century CE), following the progress of a brand of Shivaism hostile to Buddhism in South India, a first definition of a Sinhalese identity, based on religion, comes to head in the Mahâvamsa. Thence, that identity newly defined in opposition to Tamil unbelievers, will keep consolidating at the same time as Theravada slowly yields grounds on the continent. In the 12th century CE, in answer to the occupation of the island by the Chola South-Indian dynasty, a reconquista war is led by the hero of the Polonaruwa period, Parakramabâhu. The following centuries, until the arrival of the Portuguese, will see repeated incursions of Tamil and Kalinga princes with their «gangs» (Tambiah, op.cit., 1992, p. 140) which will precipitate the fall of the Polonaruwa kingdom in the Center of the island. The desertion and drying up of that area still divides the island between a Southern Sinhalese domain and a Northeastern Tamil majority region. The Sinhalese/Tamils antagonism still can be seen in the middle of the 19th CE when the elite of Kandy, the last independent Sinhalese kingdom, calls the British to the rescue in order to get them rid of the Nayakkar, a Tamil dynasty suspected to be Buddhist only in name.
Meanwhile, starting from around the 8th century CE, Theravada had bounced back from some of its residual pockets and niches in Eastern India to take root in Indochina. By the 11th century, its followers there were ready to turn to Ceylon, the only country of the Indian world where Theravada had remained dominant, for religious inspiration (texts, monks and relics) as well as for trade, and occasionally, war.
Indochina
Indians contributed to the emergence of the first Indochinese States as early as the 2nd and 3rd centuries CE, but, strangely enough, on the Easternmost shore of the peninsula, on the China Sea: Champâ, in present days South Vietnam, and Funan, the forerunner of Cambodia. Meanwhile, the hinterland and most of the Indochinese subcontinent was to remain for several more centuries a wild area occupied by scarce animistic forest tribes, a bit like what Ceylon must have looked like when the first Aryans reached it, soon followed by the first Buddhist missionaries. It is there that Theravada was, starting from the 5th –7th centuries CE, to successfully take root and impress its model of the state in an rather virgin area with as a result some sort of confusion between national and religious identity that cannot be observed in the Mahayana countries, Tibet excepted.
I did not go in my dissertation over the details of Mahayana’s history. But most will admit that it is a deeply sinicized Mahayana that spread to other parts of Eastern Asia, Japan, Korea and Vietnam, after having accommodated to pre-existing Chinese religions, the social system and political philosophy, where Buddhism holds towards society and the state a position very different from that it held in Indian types of polities, and never, in Tibet excepted, an undisputed or monopolistic one.
*
In the areas where Theravada eventually prevailed, just as belonging to the Christian faith did not prevent European nations from waging war against one another, allegiance to the same school of Buddhism did not keep Theravada countries from conflicting relationships.
The first unifier of Burma, Anuruddha (Anawrahta/Anôratha :1044–1077) had his capital and base in Northern Burma near Pagan where a decadent tantric Mahayana had spread from neighboring Bengal. Finding the Mon Theravada of the central and southern regions more to his taste, he requested texts and relics from King Manuha of Thaton, equally Burmese, in Lower Burma. Manuha refused, giving so a pretext to Anuruddha for invading his kingdom, unify Burma and import Theravada from Thaton to Pagan15.
Anuruddha also established the first official contacts between a Theravada Indochinese country and Ceylon, inaugurating a pattern of exchanges between Ceylon and Indochina which, after a brief trade war between two of their successors, the Sinhalese Parâkramabâhu (1153-1186) and the Burmese Alaungsithu, continued almost uninterrupted despite incidents often related to relics, the possession of which was an important symbol of power and protection from above.
Anuruddha had initiated, in the relationships between Theravada countries a pattern that we could call the Anuruddha syndrom, that is the competition between Theravada countries for the possession of the Faith symbols, as well as for the purity, not so much of the orthodoxy, but of the orthopraxis, or observance, of their respective monastic lineages or nikâyas, which provided them with rights to the leadership of the Theravada world. That competition took at times a violent turn, reminiscent of the contest between Christian monarchs — the Very Christian King of France, the Very Catholic King of Spain, The Holy Romano-Germanic Emperor, the British King, Defender of the Faith — as to who was « more Catholic than the Pope ».
In those interactions, although supply and demand regularly came from both sides, Ceylon always enjoyed a special prestige as the oldest Theravada country where the Canon had been conserved and put to writing around the turn of the CE. In comparison Burma, coming into existence as a distinct entity from the 10th century CE, Thailand from the 13th century CE, and Laos even later, were much younger nations.
From the 11th century CE, the Mons and Pyus having been reduced, the history of the peninsula is that of the Burmese and Thais repelling the Khmers to the South-East (which was achieved in the 13th century CE) and converting them to Theravada (which had begun even earlier, under Jayavarman VII himself) before coming themselves into conflicts that are not quite over yet. From the 13th century on to the 19th century CE, the history of the peninsula is that of the difficult relationship between Burma and Siam.
As we said, some of these wars had religious motives or pretexts (Hazra, op.cit,1981, p. 164–165). One of the first attempts to invade Ayutthaya by the Burmese in the 16th century CE aimed at capturing white elephants, distinctive emblems of a dhammarâja or Buddhist sovereign (Hazra, op. cit., p. 120 and 165). After Ayutthaya was finally taken, the Sâsanavamsa tells us that Anekasetibhinda (Bayin Naung) sent the Thera Saddhammacakkasâmi and prince Anuruddha to Siam in order to «purify the religion there» (Hazra, op.cit., 1981, p. 138–139).
Between Laos and Thailand the tension and recurrent conflicts partly pertain to the fact that Thais and? Laotians are ethnically and linguistically related, whence the permanent temptation for Thailand to attract or maintain her small cousin in her orbit. In 1777 Vientiane is taken by Phaya Tak, who had restored Siamese independence after a Burmese incursion. In Vientiane he took the Phra Keo, a precious emerald statue of the Buddha, and brought it over to Bangkok where it can still be worshiped at the Wat Phra Keo. In 1828 the Siamese invaded Laos again, destroyed Vientiane, deported part of its population to the Thai North-East (Issan), and occupied Champassak. On the eve of the French colonization, the North and East being occupied by Vietnam, there was of Laos only the Luang Prabang principality left16.
Monks in politics : Monk-kings and King-monks
In Indochina, kings frequently became monks and vice versa17. In Burma, King Dhammaceti (15th century CE) was a monk in Ava (North) before becoming king of Pegu by marrying the daughter of Queen Shin Sawbu whom he had helped flee Ava where she had been married to the local king against her will (Hazra, 1981, p. 108, in note).
Thibaw, the last king of Burma (Trevor Ling, Idem, p. 68), who after having been a monk, massacred his rivals to become king before being finally forced by the British to abdicate in 1885. The way he had gotten the throne did not prevent Burmese nationalists, and amongst them many Buddhists, to consider him to be a martyr.
In Thailand, Mahâsami, grand son of Pha Müöng, who had helped Râma K’amhèng to establish the Sukhodaya kingdom, left the royal cloak for the robes of a forest monk, living on roots and fruit « as a Sinhalese monk » (Hazra, Idem, p. 151 and G. Coedès, op. cit., pp. 398–399). Lü T'ai, son of King Lö T'ai of Sukhodaya became a monk in 1361 after losing his kingdom to the first king of Ayutthaya, Râmâdhipati18. The phenomenon became specially remarkable in the XVIII th century(?). After the taking of Ayutthaya by the Burmese, local centers of power emerged here and there in the country. In Sawangbury, North of the central plain near Sukhodaya, a Buddhist monk called Ruan took control and appointed some of his colleagues as generals and officers. He also considered it to be within the scope of his competence to monitor the Sangha’s training, both moral and physical. Around 1777, as he started to manifest symptoms of eccentricity, his general Phraya Chakri took over and in 1782 moved the capital to Bangkok where he founded the present Chakri dynasty (Trevor Ling, Idem, p. 51). Two of the Chakri kings, Mongkut et Chulalongkorn, were monks before accessing the throne, and several princes ended up as Thailand Supreme Patriarchs of the Sangha..

In Burma King Alaungpaya, founder of the Konbaung dynasty identified himself as a Cakkavatti and Metteyya combined, before besieging Ayutthaya (Collins, p. 398) in order to reform the faith there. The Siamese wittily replied that if he really was Metteyya he should be standing in the Tusita Heaven rather than before the walls of Ayutthaya.
The 20th century
A striking paradox of the politico-religious scene in the Theravada world is that in Sri Lanka and Myanmar the Sangha shows a pro-Marxist bent to the point of seeing in the Buddha a forerunner of the socialist ideology and/or the welfare state, while in Thailand anti-Marxism is prevalent among monks. In Laos, the inclusion of the country in the Vietnamese zone of influence did not leave monks the choice to take a stand, and in Cambodia monks were among the first victims of the Khmères rouges.
The Thai Sangha’s anti-communism has at times been virulent. In 1976 Kittivuddho19 a far right monk20, declared that killing communists did not entail bad karma for it was an ideology that was aimed at, and not people. Taking perhaps his inspiration from the non-canonical Sinhalese Mahâvamsa, he added that « these enemies of the nation and religion were anyway not really people but wild beasts». The former Junta Chief, Thanom Kittikachorn, had been obliged in 1973 to flee to Singapore where he was accepted as a novice and received the lower ordination. After it was announced in 1976 that he wanted to come back to Thailand to receive the higher ordination (upasampada) at Wat Bovornives in Bangkok, street troubles started. The general came back anyway which triggered more troubles. Hundreds died and a new coup restored the army to power with a program inspired partly by Kittivuddho’s Party, the Nawaphon, even if no member of that Party got a seat in the new junta for, as Charles Keyes (op.cit, p. 160) remarks, it seems that militant Buddhism makes the Thais, even the most nationalist, feel uneasy.


In Sri Lanka the Sangha followed two opposite directions, one we could call conservative, the second socialist or leftist and nationalist. The colonial era (1505–1948) had been here longer than in any other Theravada country. That may explain the strength and periodic reaffirming of the nationalist themes.
In 1948, Sinhalese Buddhists were still the majority (70–80 %) but felt threatened in their social status. Their economical basis still was, as before the colonial period, land property, large, middle and small, while administration, politics, schools and university were controlled by Christians, Sinhalese or Tamil, and by a fraction of the westernized English-speaking Christian-Buddhist elite. Liberal professions were the monopole of Tamil high castes, and Muslims (7%) controlled large sectors of the international trade sector. In addition the Sinhala language was challenged by the increasing use of English. The majority developed a «minority complex»21 that can be compared to that of the Indonesian and Malay bhumiputras, although in the case of the Sinhalese, it would be more exact to speak of buddhaputras22.

Even before independence, Dhammapala, the fervent anagarika who had led a Buddhist revival that was later coined « protestant Buddhism», may have contributed to the hostility of the new Sinhalese bourgeoisie towards their Muslim competitors, which resulted in the 1915 riots. Following these, he wrote to the State Secretary for colonies a letter in which we can read:

The Muhammadans, an alien people who in the early part of the nineteenth century were common traders, by Shylockian methods became prosperous like the Jews. The Sinhalese, sons of the soil, whose ancestors for 2358 years had shed rivers of blood to keep the country from alien invaders,...today...are in the eyes of the British only vagabonds... The alien South Indian Muhammadan comes to Ceylan, sees the neglected, illiterate villagers, without any experience in trade, without any knowledge of any kind of technical industry, and isolated from the whole of Asia on account of his language, religion and race, and the result is that the Muhammadan thrives and the sons of the soil go to the wall.23

After independence, it did not bother parties centering on Buddhist «communalist » themes to ally with new Marxist parties explicitly legitimizing violence against the «class enemies»24. The contradiction is difficult to avoid even if one reckons with the fact that those alliances were often supported by the Amarapura et Ramañña nikayas which recruit mostly in the middle and lower castes. The Siam Nikaya, accepting only high cast goyigama (land owners) in their fold, as well as the Catholic Church, equally well endowed in real estate, generally supported the right of center business friendly UNP, also more tolerant with regard to ethnic, religious and linguistic differences.

In 1959, following a series of violent incidents with Tamils where monks or «fake monks» played a role often as inciters more than perpetrators25 S.W.R.D Bandaranaïke, leader of the MEP (Mahajana Eksath Peramuna: People's United Front) a leftist coalition including the Marxist party VLSSP, the Basha Peramuna (Language Front) and diverse leftist independents as well as Bandaranaïke’s own party the SLFP (Sri Lanka Freedom Party), was killed for not having followed up with his electoral promises26. The perpetrator was a monk mandated by a «politician-monk», Buddharakkhita, whose Eksath Bhikkhu Peramuna (United Monks Front) had greatly contributed to the MEP’s victory in 1956.

In the seventies and eighties, young monks’ activism was reactivated, feeding on themes such as: opposition to any negotiation with the Tamil federalists and the terrorist organization LTTE, to any autonomy for the Tamil majority Northern and Eastern provinces, to the presence of the Indian Army there – called to rescue in 1987 – to spreading consumerism and to a free exchange zone promoted by the UNP. On these themes it is with the JVP—whose program was egalitarian, populist, nationalist, and Buddhist—that as soon as 197127 militant monks confronted not so much the Tamil minority than the government (Tambiah, 1992, p. 95 and sq). That solidarity has been explained by the common rural background of the JVP adherents and the young monks of the Amarapura and Ramañña nikayas.

After a parenthesis of about ten years, at the beginning of the 21st century, and the end of Chandrika Kumaratunga’s reign, monks took to politics again with clearly nationalist slogans. Judging Chandrika Kumaratunga too soft with the LTTE and the Norwegian negotiators, they founded a new party, the JHU (Jathika Hela Urumaya) defending Sri Lanka’s national and religious heritage. In addition to their opposing granting any autonomy to the Northern and Eastern provinces, they added two themes that stress their rightist character. First, they want to promote a law forbidding unethical conversions, generally from Buddhism to Christianity, arguing that those conversions are purchased⁠. Secondly, they oppose the funds from international donors after the December 2004 tsunami being handed over directly to Tamil victims through the LTTE.

Mahinda Rajapakse, also a candidate of the C. Kumaratunga’s SLFP, won the 2005 presidential elections after promising the JHU to take a firmer stand towards the LTTE. The two parties signed an agreement rejecting federalism as a basis of a peace agreement with the LTTE, the terms of the 2002 cease-fire agreement as well as the government/LTTE joint management of the tsunami funds (World Socialist Website, September 21, 2005, signed Wije Dias).

Consequently, it is with the backing of a political party managed by monks that the offensive against the LTTE strongholds in the East and North have resumed. Presently the Sri Lankan Government has retaken control of the East and exerts heavy pressure on the North. Although the LTTE has been listed as a terrorist organization by most western countries, indiscriminate bombing of civilians inhabited areas by the Sri Lankan Army, lack of long term political foresight for the period following a possible victory, and in general neglecting diplomacy for an exclusively military strategy are among the reproaches currently addressed to the Sri Lankan Government.

About Burma Tambiah (1992, p. 100) wrote:

The participation of monks in rebellion and millennial movements in precolonial times against the British raj, and subsequently in post-independence times, is not new. Burma has perhaps the most impressive evidence of this. Examples are the Saya San rebellion in the 1930s and the most recent uprisings in 1988 (continuing to this day) by the students and young monks of Rangoon and Mandalay against an oppressive military regime.

Regarding minorities, in Burma, it is mainly the presence of an important and prosperous Muslim minority that provoked troubles even before the end of the colonial era. In 1938, Muslims were accused by «political monks» of «stealing» Burmese women. On the 26th of July of that year, a meeting was organized at the Shwe Dagon pagoda; it was followed by a demonstration which headed to the Indian (Muslim) neighborhood where it turned into riots targeting Muslims. For a few days the Rangoon area was prey to anti-Muslim and anti-Indian hysteria. It took a while before order was restored 28.

In spite of his declared intention, in 1950, to make Buddhism Burma’s constitutional religion (Trevor Ling, 1979, p. 129) U Nu refused in 1954 to exclude the teaching of Islam and Christianity from State subsidized schools. That refusal triggered a nation-wide upsurge and it is on the asking of Muslim leaders, fearing a repeat of the 1938 riots and pogroms, that he yielded to the fundamentalist monks´ demands. Still he made Buddhism the State religion in 1961. The erratic and indecisive course of his policies, as well as his clumsy management of ethnic minorities’ rebellions, mainly Karens and Shans, led to general Ne Win’s Buddho-Marxist coup in 1962.

Nowadays, under a military dictatorship (from 1989 on) which no longer refers to Marxism nor to Buddhism, certain monastic groups continue to worry about Muslims’ demographic progress and hypergamous strategy. I have observed for myself in Rangoon the tension between Muslims and monks in 1998. A Western monk belonging to a Burmese lineage29 told me that confrontations between monks and Muslim groups still had occurred over the last five years, that is since 2002.

But it is the troubles in the three southernmost Muslim provinces of Thailand30 that since 1990 are making headlines again. Following an increase of terrorist attacks in the South in 2004 the former Prime Minister Thaksin Shinawatra, considering them as mere criminal phenomena declared an emergency in 2005. The suppression, as brutal as inefficient, only served to kindle the fire. It is said that the worsening of the situation there is the main reason why King Bhumipol of Thailand accepted the September 2006 the coup led by General Sonthi Boonyaratkalin, a Muslim, with a program of granting Muslims in the South the right to apply the Sharia law among themselves regarding personal matters (marriage and inheritance). New terror attacks resulted in some 2 100 casualties and in March 2007 when I was wrapping up my dissertation, violence was continuing unabated. In reaction to these events proposals have been re-iterated to make Buddhism the official religion of Thailand31. But the general public as well as the Sangha, at least in Bangkok and the North, seem to remain remarkably calm with regard to the problem in the South.
Death penalty in Theravada countries
Most of them, most of the time, presently commute death penalty to life sentence but in case of a severe crisis, as under Shinawatra in Thailand for drug related crimes, it happens that the sentence is executed. Among them, Cambodia is the only country where the death penalty has been abolished, in 1993, but extra-judicial execution is frequent.

Conclusion
Why, among countries where Buddhism spread, do Theravada countries, despite the most pacifist doctrine of the Pâli Canon, remain more prone to religious and ethnic violence than their Mahayana counterparts?
I already suggested elements of explanation. Let me try now to wrap them up. The Pâli imaginaire was molded in the Indian environment, climatic and cultural, where holy men, religious mendicants, monks, were respected and protected by the state32. It spread first to areas still mostly without any state tradition, and similar to India with regard to climate. It could so impose the Buddhist concept of the state, as defined in the Pâli suttas, jâtakas and Mahâvamsa, as on a tabula rasa. To put it in another way, in Theravada countries Buddhism created the state. This contributed to the fusion in these countries of national, state and religious identities whereas in most Mahayana countries, Buddhism had to accommodate and yield to pre-existing formalized religious and socio-political concepts and the monkhood did not enjoy such an almost constitutionally privileged status as it did in Theravada polities.
According to the Pâli tradition, protection of the Sangha is constitutive of the cakkavatti’s and/or Buddhist state mission. But in the present Theravada world, only in Thailand does the state still fully play that role. In Sri Lanka, the respective status of state and Sangha has been debated and criticized for a long time, especially among urban educated «protestant Buddhists». But since the outset of colonization, even after independence, the state in Ceylon does not play anymore its traditional protective/disciplinarian role with regard to the very independent nikayas making up the Sangha. After independence the Sri Lankan state apparatus, not longer wholly Buddhist as it included well organized Christians, Hindus and Muslims, was not able or ready to play that role, abandoning the Sangha to its internecine disagreements and inability to reach a minimal consensus even regarding the definition of their common interests. In Myanmar the bond was broken in 1989 with the arrival to power of General Than Shwe. As for Laos and Cambodia one can surmise that the Sangha there, if protected, is also muzzled and mainly used as a prop by the communist establishment.
Can the Theravada Sangha institution and establishment survive in a political environment where the traditional bond between Sangha and state is relaxed or nonexistent? Are the Sangha’s confrontational attitudes observed in Sri Lanka and Burma/Myanmar answers to challenges that are experienced as threats to their status, more exclusively privileged and monopolistic than that of monks in China, Japan, Korea and Vietnam? These are the questions that I propose to the reader as a conclusion, with a corollary and prospective question: can Theravada Sanghas adapt to the challenges of this increasingly global world, as the Northwestern Indian, Central Asian and Chinese Sanghas did to new conditions two thousand years ago33, while keeping a literal reading of the Pâli Vinaya (monastic code of conduct) regarding, for instance, the interdiction for monks to deal in any way with agriculture because it would imply getting involved in killing insects and other small organisms?
Thailand in that respect may have shown the way. Under the enlightened leadership of the Chakri monarchs, the Sangha here strove to become more socially active (schools, universities, hospitals, counseling even in agricultural productivity improvement strategies) renewing in that way the bond not only between Sangha and state but also, and perhaps more importantly, with civil society34.




1Bouddhisme theravada et violence
2DEA : Diplôme d’Études Approfondies.
3Readers who want the complete dissertation can obtain it, with the original Pâli scriptures or only their French translations, by sending an e-mail to jhuynen@gmail.com
4L’enseignement du Bouddha, 1978, p. 22.
5The conflict between China, large sections of the Tibetan people and the Government of the Dalai Lama is more cultural, linguistic and political than religious in nature.
6Collins Stevens, Nirvâna and Other Buddhist Felicities: Utopias of Pali Imaginaire,Cambridge: Cambridge University Press, 1998.
7Mahâparinibbâna Sutta (DN, II, 16 et sq); we use here the VRI edition (134–136) = Ed. PTS ii, 72.
8DN.III.58-77
9Defined as «no killing, no taking what is not given, no lying, no taking intoxicants, no abusing sensual pleasure, no overeating which roughly matches the pañca sîla or five interdictions to be respected not only by monks but also by lay followers of the Buddha, while the specific dhamma (duty) of the cakkavatti can be summarized as «promoting the dhamma, protecting monks and brahmins, ordinary people, poor and rich, as well as animals. Cf. PTS 61 (5).
10S. Collins, op.cit., p. 335.
11Anguttara Nikâya. PTS : II, 74–76.
12See chapter IV of A. Smith, The Oxford History of India, Oxford University Press, 2006 : 22nd reprint of the 1958 Indian edition (first published 1919).
13See Schmithausen Lambert, “Aspects of the Buddhist Attitude towards War” in Violence, Non-Violence and the Rationalization of Violence in South Asian Cultural History. Ed. Jan E.M.Houben and Karel R.Van Kooij, Leiden, Brill, 1999.
14Some pro-war milieus in Sri Lanka presently advocate its inclusion in the Canon.
15Hazra Kanai Lal, History of Theravâda Buddhism in South-East Asia, with special reference to India and Ceylon, Munishiram Manoharlal Publishers Pvt Ltd, New Delhi, 1981, pp.79–85.
16 Xavier Roze, Géopolitique de l’Indochine, Paris, Economica, 2000, p. 2 and map p. 107.
17Trevor Oswald Ling, Buddhism, imperialism and war: Burma and Thailand in modern history, London; Boston: G. Allen & Unwin, 1979, p. 51.
18G.Coedès, op. cit, pp. 398–402.
19Communists had just taken power in Laos, Cambodia and Vietnam. Cf. Charles Keyes « Political Crisis and Militant Buddhism » in B.L.Smith, Religion and Legitimation of Power, p.150 et sq.
20There also was a leftist monks faction, the Yuvan Song.
21S.J.Tambiah, op.cit., 1992, p. 33
22Cf. Sarath Amunugama. «Buddhaputra and Bhumiputra ? Dilemmas of Modern Sinhala Buddhist Monks in Relation to Ethnic and Political Conflict» in Religion, 21 (1991): 115-39.
23Ananda Guruge, ed. Return to Righteousness: A Collection of Speeches, Essays, and Letters of the Anagarika Dharmapala. Colombo: Government Press, 1965, p. 540, quoted by S.J.Tambiah, 1992, p. 8.
24See, Donald Eugène Smith, Ed., South Asian Politics and Religion, Princeton University Press, 1966, p. 484, and all chapters dedicated to Sri Lanka which provide a very thorough account of the ground in which posterior events — the beginnings of Tamil terror attacks, the anti-Tamil pogroms of 1983 and the recent 2006 rekindling of war — are rooted.
25Tambiah, 1992, pp. 49–57.
26Nationalizing of private schools, mostly Christian.
27It is said that weapons were found in certain monasteries , cf. Tambiah, 1992, p. 96.
28Trevor Ling, 1979, p. 88.
29Following his request, I prefer not to mention his name.
30 Pattani, Yala, Narathiwat and, marginally, the province of Songkhla.
31So far the only clause along those lines in the Constitution is that the king must be a Buddhist.
32When Buddhism came to areas where the respect and protection of mendicant monks by society and state could not be taken for granted, monks had to adapt, become land owners and even marry, as in Tibet.
33See Jean Naudou, Les bouddhistes kashmîriens au moyen-âge, Paris, PUF, 1968; Jacques Gernet, Les aspects économiques du bouddhisme dans la société chinoise du V e au X e siècle, Saïgon, EFEO, 1956 ; Gregory Schopen, Buddhist Monks and Business Matters, Hawaii University Press, 2004.
34According to Tambiah S.J.( World conqueror and world renouncer : a study of Buddhism and polity in Thailand against a historical background, Cambridge [Engl.]; New York: Cambridge University Press, 1976) between 30 and 50% of the Thai administration, academia, army and police are composed of former monks or have been trained in monasteries .